Always confusing the thoughts in my head, so I can’t trust myself anymore [c'était l'instant émo]
Avais-je froid ? J'ai frissonné tout du long. Avais-je faim ? J'en suis sortie avec un mal de ventre terrible.
Kotoko, de plus en plus, s'enfonce dans l'angoisse, se laisse gagner par ses démons, quelquefois s'apaise dans un sursaut, et partout nous entraîne avec elle.
D'abord, c'est le son, écrasant, oppressant, qui nous étouffe complètement. L'a-t-on réglé trop fort ? On sait pourtant que non. Ces cris d'enfant qui deviennent hurlements, ces tintements de vaisselle qui deviennent fracassements. Ils nous poussent à bout. C'est le son qui vient apporter sa force à l'image, et grâce à lui la folie prend son sens. Nous sommes loin des énigmes léchées et mystiques d'un Lynch, ici, les hallucinations sont véritablement angoissantes, même une fois identifiées comme telles, car l'on se sent acculé, et toujours ce son qui écrase et dont on est pressé d'être libéré. C'est donc tout naturellement que l'on accepte les scènes chantées comme celles de l'apaisement, des moments de grâce bien qu'elles soient tout aussi empreintes de désespoir.
Mais l'image, elle aussi, est habilement maîtrisée. Cadrée nerveusement, elle nous laisse aussi démunis que Kotoko. Nous ne sommes pas plus capables qu'elle de discerner le vrai du faux. Si au début, il est assez facile d'analyser les situations et de comprendre ce qu'il s'y passe, très vite on perd son détachement, se perd tout court, et l'on se sent en perpétuelle insécurité scénaristique. Plus le film avance, moins l'on a de certitudes, et on a l'impression d'assister à sa déconstruction complète.
Le rythme, enfin. Il y a dans ce film une oscillation cauchemardesque. Sans cesse on est inquiet, sans cesse on est soulagé pour retrouver, encore, l'angoisse à la suite. En ce sens, j'ai l'impression d'être face à un film d'horreur, jouant avec mes nerfs de bout en bout. Et pourtant on l'oublie presque au cours de quelques scènes que rien ne peut sembler troubler.
Kotoko, on est proche de son cœur, d'un bout à l'autre. On ressent son angoisse, on ressent aussi l'allègement, le soulagement dans ses moments de bonheur. C'est là pour moi le talent du cinéaste, qui arrive à nous rendre sensible même ses extrêmes. C'est le fruit d'une mise en scène oppressante, agressive même, mais à laquelle il faut, je pense, être un minimum préparé, car j'imagine qu'elle peut facilement sembler artificielle si l'on conserve trop de recul. Et même si on se laisse séduire, alors il faut s'attendre à une charge émotionnelle pas forcément agréable à supporter.