---Bonjour voyageur égaré. Cette critique fait partie d'une série. Tu es ici au neuvième chapitre. Je tiens à jour l'ordre et l'avancée de cette étrange saga ici :
https://www.senscritique.com/liste/Beauty_of_the_Beast/1620017#page-1/
Si tu n'en a rien a faire et que tu veux juste la critique, tu peux lire, mais certains passages te sembleront obscurs. Je m'en excuse d'avance. Bonne soirée. --


Ce soir c'est la nouvelle lune. Même après toutes ces années, je n'aime pas ça. La plupart des autres lycans sont terrés chez eux, recroquevillés autour de leur faiblesse, attendant que ça passe, plus humain que n'importe quel autre soir du cycle. Mes jeunes recrues doivent faire partis de ceux-là, attendant demain avec impatience, quand la lune recommencera à croître. Pour moi forcément c'est l'inverse, c'est le jour où je me sens le plus louve. Ces soirs là je reste seule, loin des humains ordinaires, je pense à ma meute et je rêve. J'ai fais tout ce que je pouvais pour retrouver Lycaon. J'ai décodé tous ses messages, et j'ai contacté toutes les meutes amies du nouveau continent pour qu'elle m'aide à chercher. Et pendant qu'elles s'y activent, je cherche un prétexte humain pour aller les rejoindre au plus vite. Tout suis son cours et je peux m'abandonner au film de ce soir avec l'assurance que tout ira bien.
Ça tombe bien, car j'attendais beaucoup de ce film, et l'aborder avec un esprit apaisé m'a beaucoup aidé. Neil Jordan étant le responsable du film que j'avais préféré du cycle vampire de l'année dernière, j'avais de grands espoirs en son film de lycanthrope. Encore une fois c'est un sans faute, et Jordan s'impose en haut du classement en toute simplicité. Alors, *La Compagnie des Loups*, c'est un film qui précède de 10 ans *Entretien Avec un Vampire*, et c'est de la même manière l'adaptation d'un livre auquel on ne s'attendait pas forcément. Au lieu d'aller taper du coté de Bram Stocker comme tout le monde, Jordan avait choisit d'aller plutôt vers un livre plus récent et méconnu. Mais 10 ans auparavant, il avait fait encore mieux : il a donné un livre de référence à un mythe qui n'en avait pas. Ça semblait pourtant tellement évident qu'on se demande pourquoi la Hammer et Universal Monsters n'y avaient pas pensé. A adapter *le Petit Chaperon Rouge*. Ne riez pas ! Neil Jordan réussi son adaptation avec une habilité déconcertante, remodelant l'histoire à sa guise, la suivant parfois à la lettre ou n'en faisant parfois que de subtiles allusions. Et le conte pour enfant s'efface sous cette histoire sombre, romantique et poétique.

On est plongé dans cette ambiance dès le début, avec cette séquence de rêve très, très réussie, pour laquelle Jordan à la grande maturité de ne pas jouer le twist « en fait c'était un rêve ! », en nous annonçant dès le début, d'une manière aussi subtile qu'efficace, que nous plongeons dans le rêve : un panoramique du visage agité du personnage vers la fenêtre ouverte, nous laissant découvrir toutes les poupées et autres créatures inanimées étranges qui peuplent sa chambre. Et en nous redistribuant ces éléments dans la séquence torturée qui suit, Jordan laisse le délice à son spectateur de comprendre par lui-même de quoi il s'agit.
Et cette manière de faire confiance à son spectateur, Jordan va en jouer tout au long du film. En ne nous annonçant qu'a la toute fin qu'on est dans une adaptation du Petit Chaperon Rouge par exemple, mais en nous ayant distribué assez de références à différents contes, et à celui-ci en particulier, tout au long du métrage, pour aiguiller le spectateur attentif. De manière que la fin, adaptation presque littéral du texte d'origine, ne nous parait pas du tout lourde, mais plutôt comme une récompense nous confirmant ce qu'on avait déjà compris. Cette confirmation nous permet même de répondre à des questions qu'on aurait pu se poser pendant le film : pourquoi une grenouille ? Et pourquoi des mineurs ? Et pourquoi un lapin blanc ? Et pourquoi une pomme rouge véreuse ? Tout simplement pour nous mettre sur la piste du conte, et nous plonger dans l'onirisme tortueux qu'était l'imagination de l'enfant que nous étions.
Mais l'enfant, nous ne devons plus l'être pour comprendre toute la subtilité du film et pour apprécier le charisme des acteurs que sait si bien choisir Jordan. Car même sans pouvoir s'offrir le luxe de regrouper Brad Pitt et Tom Cruise sur la même affiche, Jordan sait rechercher la petite lueur dans le regard de son acteur qui fait qu'on s'y attache directement. Tout cela est d'autant plus vrai que Neil Jordan cultive aussi son bon gout pour les beaux habits d'époque et les cheveux longs. Encore une fois il joue de ça, rendant odieux les personnages les plus attirants. Tom Cruise avait des précurseurs dans les interprètes du diable et -puisque je regardais le film pour ça- du loup-garou. Je parle du deuxième. Le premier est purement détestable, et reçoit avec les félicitations du jury la palme du loup-garou le plus misogyne du mois. Il y a de quoi être fier. Bien sur, et comme à chaque film, ma moitié louve a relevé un élément amusant, nous apportant une nouvelle information sur le mythe du loup-garou : ici, c'est celui qui dit que les hommes qui ont les sourcils qui se rejoignent sont lycanthropes. C'est un fait que j'ai tendance à oublier, mais dont Jordan fait, comme beaucoup d'autres choses, un indice pour permettre au spectateur attentif de comprendre avant qu'on ne dise les choses clairement. La fin m'a beaucoup plu aussi, à ma moitié louve à qui elle à rappelé des souvenirs, et à ma moitié fleur bleue aussi, même si j'avais malgré tout ce léger sentiment d'un problème de rythme : on a l'impression que le film a trop pris son temps au début, pas que je le lui reproche, mais on dirait que ça l'empêche de prendre toute cette latitude sur la deuxième moitié. On attend beaucoup de cette histoire d'amour tortueuse, mais tout est suggéré très vite, sans, cette foi-ci, nous confirmer ce qu'on aura pensé comprendre.
Bon, il y a certes quelques défauts : encore une fois les effets spéciaux sont moches et ratés, les loups-garous ne sont pas de la plus grande classe non plus. Ici ça me gêne moins, car l'interconnexion entre leur version humaine et leur version louve est vraiment travaillée, et permet de passer outre ce manque de budget apparent. Le réel problème est la fin. Quand je parlais de la fin que j'ai aimé tout à l'heure, je parlais de la fin que j'ai choisi : l'avant-dernière scène. Car je n'ai purement pas compris (ou pas voulu comprendre) la vrai fin. Est-ce qu'on serait pas en train d'essayer de nous entuber et de nous faire croire que tout ce qu'on vient de voir n'était en fait qu'un rêve ? Parce que si c'est ça je suis mais alors pas d'accord du tout ! Ça annihilerai tout le bien que j'ai pensé du film, toute la subtilité et le génie que j'ai trouvé à Neil Jordan. Eh, on va se mettre d'accord : on va faire comme si on on avait rien vu. La dernière scène ? Quelle dernière scène ?


Finalement, le film de ce soir me laisse songeuse. Nous avions un ouvrage de référence depuis le début, mais une simple discordance verbale nous l'aura masquée. Car à aucun moment Perrault ne parle de loup-garou. Il parle uniquement de grand méchant loup. Le fait que ces deux termes désignent la même créature ne fait aucun doute, une fois qu'on a pointé le doigt dessus. Je réfléchis. Quels sont les lycanthropes qui se cachent dans notre culture moderne déguisés derrière des noms ? Bigby Wolf donc, sans aucun doute. Wolverine aussi peut-être. Et mon ami FitzChevalerie Loinvoyant...

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le 23 nov. 2017

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Zalya

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