Italian connection... ou « Dis Jean-Baptiste, Thoret pas vu la fin du film !?! »

(C'était avec impatience et plaisir que j'attendais l'édition Studiocanal, collection Make my day de Jean-Baptiste Thoret, sortie fin janvier. Pour ma part, ce fut malheureusement une amère déception, cette édition ne contenant pas la fin, le moment de bravoure du film… Un peu plus de 9 minutes passées à la trappe… Après avoir contacté Studiocanal, ils m'ont expliqué que Thoret était parfaitement au courant de ce fait, pourquoi alors ne pas le mentionner ? Car les gens ne connaissant pas déjà le film ne sauront jamais qu'ils sont en fait passés à côté…
Enfin, j'ai eu l'immense plaisir d'avoir un retour de Enzo Castellari lui-même ! (Voir ma couverture de profil) Il m'a ainsi expliqué qu'à la base, le film devait se terminer par la mort du commissaire Belli...mais que le producteur ne l'entendait pas ainsi ! C'est donc de manière symbolique que le personnage joué par Franco Nero "meure", durant l'ultime flashback. Une façon pour Enzo de satisfaire son producteur et sa première idée. La fin que je connais est donc la bonne. L'édition Studiocanal n'a donc pas chopé la bonne version. Une version qui existe pourtant sur des vieux DVD italiens et japonais, ainsi que sur une VHS en VF !
Ma critique ne concerne donc pas le montage Studiocanal...d'ailleurs le coffret est reparti à l'envoyeur ! Satisfait...ou remboursé !)


(1973. FR.: Le témoin à abattre. ITA.: La polizia incrimina, la legge assolve (La police accuse, la loi acquitte, absout)
Vu en VF, entrecoupée de VO, version trouvée il y a des années sur Contrebande VHS)

Gênes, années 1970. Le commissaire Belli (Franco Nero) et son supérieur Sciavino (James Whitmore) assistent, impuissants, à une guerre larvée entre les hommes de Cafiero (Fernando Rey) et ceux d'une autre organisation souhaitant prendre le leadership du trafic de drogue. Suspectant Griva (Silvano Tranquilli), un industriel respecté et associé aux hommes politiques locaux, d'être le nouveau Boss, Belli entame une enquête qui va créer une véritable hécatombe dans la cité génoise…
Premier poliziottesco de Enzo Castellari, ce La polizia incrimina... demeure encore aujourd'hui un classique du genre, étant l'un des premiers de la nouvelle génération de polars italiens 1970's. Beaucoup de bases et principes de ce genre, encore trop méconnu en France, sont ainsi érigées ici. La fameuse phrase "la police a les mains liées", que Nero lance à Sciavino, sera ainsi réutilisée dans une multitude de films, Luciano Ercoli s'en servant même comme titre de son excellent long-métrage avec Claudio Cassinelli, en 1975. Dans le même esprit, on verra Fernando Rey suggérant ironiquement à notre commissaire de baisser le pied, l'Italie étant de toutes façons un pays corrompu. Un constat à la fois lucide et droitier sur la situation d'alors. Certains journalistes accuseront d'ailleurs Castellari, notamment pour Big Racket, d'avoir une dérive fasciste...
Un autre héritage, et non des moindres, de ce La polizia incrimina… demeure dans la création de ce personnage iconique du commissaire Belli, flic sous haute-tension, blondin moustachu aux yeux clairs, toujours en train de gueuler, courir, tirer… En revoyant le film, la filiation avec Maurizio Merli (qui reprendra le même patronyme dans trois films, comme Leonard Mann dans Napoli Spara) est évidente...même si le talent de ces deux acteurs n'est pas équivalent ! Enfin, on pourra constater que le sujet du film en inspirera bien d'autres. Citons seulement deux exemples, L'homme aux nerfs d'acier de Michele Lupo ou encore La guerre des gangs de Lucio Fulci.
S'il inspira nombre de ses collègues transalpins, et pas que (Tarantino n'a jamais caché son amour pour papy Enzo!), cette œuvre Bis, est avant tout un excellent film d'exploitation. Comment ne pas songer à French Connection, sorti en 1971. De nombreux clins d'œil sont ainsi disséminés par-ci, par-là : Marseille comme plaque tournante du trafic de drogue, la poursuite automobile (orchestrée ici par Rémy Julienne), le jusqu'au-boutisme du flic, la présence Fernando Rey, la désillusion de la fin (les gros bonnets échappant à la justice)... D'autres films sortis au même moment, Le parrain ou l'inspecteur Harry, ont sans doute inspiré Enzo.
On pourra également mentionner Confessions d'un commissaire de police... de Damiano Damiani, sorti un an aupravant. Le duo Nero-Whitmore renvoyant à celui avec le même Nero et Martin Balsam. Deux personnages poursuivant le même but mais pas les mêmes méthodes, se suspectant mutuellement (clin d'œil au climat de paranoïa d'alors). La mort de Sciavino, après avoir téléphoné à un juge, et la dispute sur les hauteurs de la ville, finiront de nous convaincre du lien entre ces deux sacrés morceaux !
Enfin, signalons l'énorme prestation de Franco Nero, même si je le préfère dans des rôles plus sobres. Il est ici aussi agaçant qu'impressionnant : un flic en colère, quoi !?
Pour conclure, la B.O. des frères De Angelis est magistrale (voir les thèmes "gangster story", "life of policeman", "il libanese"...). Régulièrement associés à Castellari, ils apportent ici une plus-value indéniable. Une grande composition pour un grand poliziottesco !
La B.O. : https://www.youtube.com/watch?v=O_baMH2Vb4k
Une autre critique d'un film de Enzo Castellari : https://www.senscritique.com/film/Keoma/critique/232258758

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le 14 févr. 2021

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