Ah, Les Affranchis ! Ce fameux film qui m’a valu tant de remarques, que l’on m’a tant loué. L’incontournable, le chef d’oeuvre de Martin Scorsese, en tête de tous les classements, adulé par un nombre incalculable de cinéphiles… Voilà, enfin, saisissant l’occasion de le découvrir en plein air à la Villette, j’ai encore coché une case non négligeable sur ma liste de films cultes à rattraper.
Les Affranchis, c’est l’histoire d’un homme, du monde qu’il intègre, et son évolution. C’est la rencontre avec un adolescent fougueux issu d’une famille modeste, dont l’enthousiasme nourrit davantage des envies de liberté que d’assiduité à l’école. Le titre du film est d’ailleurs évocateur de l’état d’esprit de ses personnages principaux. Leurs vies sont placées sous le signe de l’affranchissement, avec les libertés qu’il implique, mais aussi les dangers.
Ce biopic nous fait rencontrer un panel varié de personnages, nous familiarise avec eux, et nous fait franchir les époques avec eux. Au fil du temps, les mœurs et la culture évoluent, et si Scorsese nous expose ici un microcosme semblant exclu du reste du monde, il ne l’en détache pas réellement. En vérité, il présente l’univers des affranchis comme un monde parallèle ou souterrain, que personne ne voit mais qui est partout. C’est un monde qui évolue avec son temps, où les affranchis font régner leur ordre, tout en étant traqués par la police.
Et pour raconter son histoire, Martin Scorsese fait preuve d’une maîtrise hors-normes. La caméra semble voguer et se mouvoir avec une fluidité saisissante, les musiques et les tubes de toutes époques s’enchaînent, et les acteurs ne sont pas en reste, avec une mention spéciale pour Joe Pesci, brillant mafieux impétueux et imprévisible. Le tout, enfin, est accompagné de la voix off de Ray Liotta, qui endosse le rôle du narrateur, à la fois omniscient et acteur de sa propre histoire. Les Affranchis est un film qui puise sa force dans la qualité de sa réalisation, et dans sa capacité à intégrer un univers inquiétant et caché dans un contexte culturel et sociologique associé au monde que nous connaissons, nous.
Ainsi, nous retrouvons donc ici le sens du mot « affranchis », symbole de cette société parallèle qui a refusé de suivre les codes, de s’intégrer, et qui a créé son propre système. Voilà, donc, un film dont je ne renierai certainement pas la qualité. Cependant, sans chercher à jouer les puristes, faute de véritable coup de cœur il ne sera pas ma référence numéro une en termes de films de gangsters, probablement car j’ai une affection plus particulière envers les vieux films des années 30/40 avec, entre autres, James Cagney. Peut-être est-ce, justement, parce que Scorsese cherche ici à prendre le contre-pied des films de gangsters « classiques » pour un récit plus brut. Mais c’est tout relatif, car Les Affranchis reste un film de très grande qualité à découvrir, indéniablement.