As far back as I can remember, I always wanted to be a gangster



L'introduction donne tout de suite le ton, avant que Scorsese ne reprenne le récit dès le début et nous fasse suivre trente années de la vie d'un groupe de gangsters, surtout axé sur Henry Hill que l'on découvre enfant avec un entourage majoritairement d'origine italienne alors que lui a des racines irlandaises.


Goodfellas permet à Martin Scorsese d'aborder de nombreuses thématiques qui lui sont chères, à commencer par l'enfance dans les années 1950 dans des quartiers à forte connotation italienne, mais aussi la mafia, la religion, les communautés aux États-Unis, la vision de la société, et mentalité de l'Amérique et de son système, la violence, la loyauté ou encore la trahison. C'est à travers une plongée, qui se rapproche parfois du documentaire, dans le milieu des gangsters, qu'il les aborde, on y retrouve les codes du milieu, l'ivresse du pouvoir, la violence et les excès en tous genres, que ce soit dans les meurtres, les menaces ou la drogue.


Plus qu'une plongée, c'est même une immersion tant j'ai eu l'impression de me retrouver aux côtés des personnages, à fréquenter les mêmes truands et lieux et ressentir les même sensations, que ce soit la folie, l'ivresse ou le danger. Scorsese ne cherche pas à être moralisateur, il laisse le spectateur se faire sa propre opinion de ces gars ayant choisi un mode de vie aussi dangereux que fascinant. Le sentiment de fascination provient aussi par la façon dont Scorsese arrive à rendre des gangsters d'apparence antipathiques (vision des femmes, mépris pour l'humain n'ayant pas choisi le crime, violent etc) plutôt attachants, surtout Henry Hill. D'ailleurs, toute la galerie de personnages est fascinante et très bien écrite, tant dans leurs évolutions que les rapports qu'ils auront entre eux et le metteur en scène de Taxi Driver dresse de passionnants tableaux de personnages. Scorsese montre un milieu totalement violent et corrompu où chacun des gangsters vit dans sa bulle, toujours au contact de sa bande, renforçant le sentiment de normalité de leur situation.


La construction du récit est tout simplement remarquable, Scorsese usant d'une voix off et passant de la vision d'un personnage à un autre, sans jamais commettre de fausses notes tout en renforçant la puissance de l'oeuvre et l'impression d'être à leurs côtés. Il fait preuve d'une vraie science du détail pour bien décrire ce milieu, souvent insouciant voire pathétique et même immature excepté quelques rares têtes pensantes. Plus qu'un savoir-faire, le cinéaste italo-américain se montre tout simplement brillant pour retranscrire l'évolution du gamin découvrant très jeune ce milieu en caïd sans scrupules et peu à peu perdu dans ce monde violent et sans pitié, chaque centimètre de pellicule étant d'une vraie richesse, dramaturgie et même sensation, tant aucun personnage ne laisse indifférent et que Scorsese nous imprègne de la folie de ce milieu, surtout dans la dernière partie où il nous fait vivre chaque instant de la finalité du destin des personnages.


Il fait preuve d'une vraie maestra, montrant un vrai sens de la mise en scène, incluant tension et dimension puissante et tragique à son oeuvre et mettant en place une ambiance souvent sombre et violente, mais surtout fascinante et teinté d'un féroce humour noir se retrouvant notamment dans les fabuleux dialogues souvent très terre-à-terre et jouissif à souhait. Scorsese joue sur plusieurs tableaux mais trouve toujours le bon équilibre et condense tout cela en une longue fresque retraçant plusieurs années de vie de ce groupe. Derrière la caméra il nous offre des plans géniaux et se montre techniquement irréprochable, jamais dans l'excès mais toujours avec une grande fluidité permettant une totale immersion. Il utilise une parfaite bande-son rock et blues avec brio tandis qu'il dirige parfaitement les comédiens, tant l'incandesçant et parano couple Ray Liotta/Lorraine Braco qui va passer par l'enfer et le paradis que De Niro, Paul Sorvino ou le teigneux, hilarant et effrayant Joe Pesci, tous montrant une incroyable présence.


Je ne compte plus le nombre de vision de cette oeuvre qui m'a profondément marqué et pleinement participé à mon éducation cinéma. Brillant derrière la caméra, Scorsese nous plonge dans le milieu mafieux et l'Amérique de la seconde partie du XXème siècle et livre un de ses sommets, un fascinant et effrayant chef-d'oeuvre d'une rare puissance et intensité.

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le 11 nov. 2015

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Docteur_Jivago

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