Cédant aux sirènes de comparses pressants, il est vrai que la sortie imminente des Crimes de Grindelwald était l’occasion toute indiquée de me rattraper à l’égard des Animaux fantastiques, le fameux spin-off ayant conquis une majorité du public pro-Potter : longtemps sceptique à l’égard d’une telle extension d’univers, car risquant d’être phagocytée par des aspirations financières insidieuses, l’investissement récurrent de Rowling enjoignait pourtant à l’optimisme.
Finalement, le problème est tout autre, le film de David Yates m’ayant profondément exaspéré, non sans semer ci et là bien des motifs d’espoirs quant aux suites promises : mais débutons par ce qui fâche sans tarder, à savoir cette propension monumentale à aligner, de bout en bout, une inconséquence des plus prédominantes. Bien conscient qu’il faille accorder aux Animaux fantastiques une certaine marge d’assentiment, chose que requiert intrinsèquement toute œuvre « magique », il n’en demeure pas moins que cela devrait s’opérer naturellement.
Contraint de devoir fermer les yeux sur bien des écueils d’ordre logique, j’aurai donc été incapable de m’immerger au sein de cette intrigue sens dessus dessous, Les Animaux fantastiques étant bien en peine de justifier des choix proprement handicapants : en somme, je reproche à ce dernier un usage abusif de l’argumentaire magique au service d’une cohérence illusoire, le procédé ayant tôt de fait de virer au ressort-prétexte de séquences hallucinantes de bêtise.
Mais je m’égard. Plus factuellement, prenons le cas du niffleur, petit chapardeur de son état : bien décidé à mettre la main dessus, Norbert s’illustrera de manière comico-con lors de la séquence de la bijouterie, et ce en s’échinant à l’attraper à mains nues. Sérieusement ? Ah mais oui, « Accio ! » : au terme d’un vaudeville cartoonesque, monsieur daigne enfin user intelligemment de ses capacités, plutôt que de nous servir cette soupe insipide servant davantage de meuble que de péripétie sensée.
Des exemples du même genre, Les Animaux fantastiques est en littéralement truffé, tels que l’anecdotique « Muggle worthy », ou encore Jacob se coinçant à l’entrée de la valise en raison de son embonpoint (les autres bestioles n’ont pas ce problème curieusement) : je pourrais poursuivre en ce sens encore et encore, toutefois l’intérêt est de démontrer de la paresse évidente d’écriture dont fait preuve le long-métrage, souvent à des fins bien plus importantes que de simples gags.
J’ai de toute façon un sacré contentieux avec sa trame globale, celle-ci m’apparaissant comme profondément confuse, si ce n’est majoritairement parasitée par une légèreté ambiante… mais sitôt que l’on passe outre les tribulations d’un Norbert paradoxalement imprudent, que reste-t-il à se mettre vraiment sous la dent ? Un Graves aux motivations obscures, même à la suite d’un rebondissement final rajoutant une nouvelle couche de circonspection : en ce sens, ils n’ont guère l’air de s’émouvoir du pot aux roses les génies du MACUSA, et puis s’agit-il d’une usurpation d’identité (où est l’original dans ce cas) ou bien d’une création de toutes pièces ? Mystère et boule de gomme…
Vous vous douterez également que la fiole « d’oubliette concentrée » m’aura donné du mal, celle-ci agissant tel un gros pansement nous susurrant à l’envie « T’inquiète, c’est magique ! » : mais quand on regarde en arrière, et que l’on prend pleinement conscience de la mer noire dans laquelle s’est fourré peu à peu le film, difficile de procéder autrement. Bref, Les Animaux fantastiques assure peut-être le divertissement, mais l’on est bien en peine de le prendre au sérieux : c’est d’autant plus regrettable que formellement il y a de l’idée et une ambition palpable, tandis que certains passages dénotent de par des variations de ton délectables (bien aidées par la partition réussie de James Newton Howard).
Une déception donc, mais je ne rechignerai pas à aller voir Les Crimes de Grindelwald pour deux raisons : un semblant de curiosité d’abord, ce premier jet globalement raté s’avérant envers et contre tout aguicheur en termes d’univers, et enfin car son casting aura accompli des merveilles (et je pèse mes mots). Bien qu’acteurs d’une intrigue immensément perfectible, ses protagonistes seront parvenus à susciter une empathie prégnante, qu’il s’agisse de l’originalité d’un Norbert à nul autre pareil, du comic relief finalement efficace d’un Jacob ou de la juste maladresse d’une Tina des plus originales ; la chose n’aurait certainement pas été possible sans le concours bienvenu d’une galerie talentueuse, Eddie Redmayne marquant notamment les esprits au gré d’une prestation proprement magique.
Dans le contexte grimaçant qu’invoque, pour moi, Les Animaux fantastiques, un tel apport est d’autant plus grandiose.