En s'intéressant à l'affaire de L'Arche de Zoé dans son dernier film, Joachim Lafosse dresse le portrait d'un salaud aux bonnes intentions qui s'est laissé piégé dans un engrenage de mensonges. Il aurait été facile de se casser la gueule en abordant le sujet de l'humanitaire et du post-colonialisme. Mais en prenant énormément de recul sur la situation et faisant preuve de culot pour dénoncer justement de bonnes intentions sous-couverts d'hypocrisie, Joachim Lafosse livre un film bouleversant aux antipodes de la glorification d'un pays qui veut se donner bonne conscience. Les personnages sont constamment sur un fil, à trouver l'équilibre entre leur intérêt (tout en faisant une bonne action) et ceux des enfants qui méritent un avenir meilleur. Joachim Lafosse agit de la plus raisonnable des manières, c'est à dire en laissant les outils de compréhension au spectateur qui voit ainsi, selon son bagage de connaissances et d'expériences, ce personnage énigmatique et contradictoire de Jacques. Interprété par un Vincent Lindon magistral (toujours aussi engagé un an après la consécration internationale de La Loi du Marché), ce dernier incarne un personnage déterminé, prêt à tout pour parvenir à ses objectifs, alors qu'il doit faire face à des problèmes de moyens, de communication et de pots de vin administratifs. Mais Les Chevaliers Blancs posent la question du "jusqu'où peut-on aller pour offrir un avenir meilleur ?" et montre le sordide business des ONG où l'enfant ne devient qu'une marchandise. Au fond, c'est l'histoire d'un personnage qui a voulu pour une fois cesser de penser au "moi, moi, moi" pour aider les autres, sauf qu'il est vite rattrapé par son narcissisme entraînant l'échec d'une opération humanitaire aux nobles intentions. Aux côtés de Vincent Lindon qui porte tout le film sur ses épaules, on trouve tout de même un chouette casting composé de Louise Bourgoin (puissante), Valérie Donzelli (sans relief) et Reda Kateb (toujours impeccable). Avec ses allures de film d'aventure glorifié, Joachim Lafosse casse les codes pour s'attacher à cette figure d'un meneur dépassé par les événements et ses propres mensonges. Malgré son rythme lancinant, on tient là un très grand moment de cinéma français.