J’ai eu la chance de vivre cette heureuse expérience qu'est de voir sur grand écran le légendaire M le maudit. Ce n’était d’ailleurs pas la première fois que je m’y essayais mais regarder une telle œuvre sur YouTube ne confère pas le même plaisir que celui de l’admirer en cinéma. J’ai donc pu pleinement découvrir une gigantesque œuvre du cinéma qui ne saurait usurper sa réputation.


Le chef d’œuvre de Fritz Lang demeure avant tout une performance technique pour sa photographie, son montage (opposant par exemple ces deux ennemis que sont la police et la pègre) ou tout autant que pour sa construction d’une certaine grammaire sonore, mais il nous donne aussi à voir ce que j’aime particulièrement dans l’art, à savoir l’Homme dans toute sa complexité, dans ses contradictions les plus profondes et dans son ambivalence en tant qu’essence même de l’humanité.


Ainsi, le Berlin du début des années 1930, et nous savons ce qu’a signifié cette époque, se retrouve terrorisé par un effroyable prédateur commettant ce qui pourrait bien être considéré comme parmi les plus abject des crimes, à moins que l’on ne puisse faire une quelconque hiérarchie de l’horreur, c’est-à-dire le meurtre des êtres faibles et sans défense que sont les enfants. Mais contrairement au remake qu’en fera Joseph Losey vingt ans plus tard, l’original va plus loin dans l’ignominie en sous-entendant que ce monstre est poussé par des raisons sexuelles.


Il deviendrait alors particulièrement difficile de créer un personnage plus antipathique que ce protagoniste joué par l’excellent Peter Lorre. Ainsi, la ville tout entière tombe dans une profonde psychose, n’hésitant plus à affirmer son regard accusateur à l’égard d’autrui, posant les bases d’une atmosphère nauséabonde mais, après tout, dans ces moments là, que pourrait-on faire d’autre ?


La police enquête, la ville est exaspérée et la pègre n’en peut plus de ce harcèlement, elle va donc également agir. Elle profitera alors de son gigantesque réseau et pourra confondre rapidement le fameux M, trahi par Dans l’antre du roi de la montagne, le morceau qu’il se met à siffler et qui constitue probablement la plus éminente synecdoque de tout le septième art. Voilà donc suite à la traque l’heure de procès, mais par qui ? Hans Beckert est aux mains des truands, comment peuvent-ils le juger ? Et après tout peut-on penser qu’une telle bête mériterait la justice des hommes ?


Voilà les problèmes que pose M le maudit au spectateur, non sans faire songer à L’Étranger d’Albert Camus. Après l’avoir détesté, le spectateur se prend à essayer de le comprendre, sans forcément aller jusqu’à devenir compatissant. La justice a ses limites, et d’autant plus si on la confond avec la vengeance. Mais est-on légitime pour la rendre ? Et après tout y a-t-il véritablement une réponse à cela ? C’est au spectateur de se faire son propre avis…


Mon top 10 :
https://www.senscritique.com/liste/Top_10_Films/632481

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le 29 juin 2016

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MonsieurBain

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