Avec un titre qui évoque la romance rose-bonbon qui déferla sur les écrans à Taïwan dans les années 80, cet heroic-bloodshed tendance film de triades, est réalisé par Patrick Tam, l’auteur du très bon wu xia pian post Shaw Brothers, The Sword.


Faisant partie de la « nouvelle vague » hongkongaise, mouvement initié par des cinéastes comme Tsui Hark, Stanley Kwan, Ann Hui, ou encore Allen Fong, Patrick Tam n’a à son actif que huit films, dont le fameux The Sword, mais également des titres comme Nomad avec un Leslie Cheung encore tout jeune, Love Mossacre, un thriller avec Brigitte Lin et Burning Snow avec Simon Yam. Cinéaste très ancré « eighties », il n’a depuis tourné qu’un seul film en 2006.


En plus de posséder un titre plutôt significatif, My Heart is That Eternal Rose bénéficie d’un casting d’excellente facture, avec entre autres Kenny Bee, chanteur de canto-pop célèbre et interprète d’innombrables comédies romantiques et la délicieuse Joey Wong, l’une des jolies fantômes d’Histoires de Fantômes Chinois. Tout deux forment ce couple dont la passion respective va engendrer un déferlement de violence au sein d’une triade. Avec un tout jeune Tony Leung Chiu-Wai - à ne pas confondre avec Ka-Fai, car il y effectivement plusieurs Tony Leung célèbres à HK. En plus de ce dernier, on peut ajouter le réalisateur Tony Leung Hung-Wah et Tony Leung Siu-Hung, acteur martial et chorégraphe, frère de Bruce Leung, l’un des avatars de Bruce Lee. Voilà pour cette petite aparté sans nul autre intérêt que de rappeler qu’il n’y a pas qu’un âne qui s’appelle Leung quoi… -


Donc, notre tout jeune Tony Leung interprète le troisième larron de ce triumvirat dévastateur, en homme de main du boss de la triade, épris de la jolie Joey Wong qui n’a de cœur que pour son bellâtre de Kenny Bee. Des « gueules » comme il en pleuvait (j'magine une averse de gueules par un bel après-midi d'été...) sur l’ex-colonie en cette époque bénie, viennent compléter un casting de « ouf » comme on disait à l’époque… putain ça ne rajeunit pas… Michael Chan en boss de la triade, Gordon Liu, le célèbre moinillon de La 36ème Chambre de Shaolin, frère adoptifs des réalisateurs Liu Chia-Liang et Lau Kar-Wing, mais également Ng Man-Tat, Cheung Tat-Ming et Gam Biu. Je sais que c’est peut-être un détail pour vous, mais…


Donc voilà, après ce très long intermède un chouïa délavé, entrons dans le vif du sujet avec ce film de facture somme toute assez classique. Une intrigue très secondaire que le réalisateur tente de magnifier par des procédés esthétisants de tout premier choix, une vraie volonté de faire du cinéma avec des plans sublimes, il y a Chris Doyle, le célèbre « gweilo » directeur de la photo des films de Wong Kar-Wai en chef op’, et ça se ressent, mais toutes ces velléités sont la plupart du temps réduites à néant par des effets de style clinquants et des artifices pompeux, avec notamment une musique envahissante particulièrement énervante. Côté « gunfights » c’est plutôt acceptable, même si on est très loin des standards du genre. On oublie John Woo, et c’est loin de talonner les perles du GWG (Girls With Guns pour les non initiés) ou les meilleurs Heroic-Bloodshed eighties style Tiger Cage ou A Long Arm Of The Law 2 et 3.


Entre une véritable volonté de donner des formes à son film, on sent la patte de l’auteur, même si celui-ci est le dernier qu’il mettra en scène après une carrière en demi-teinte et un dernier soubresaut en 2006, et un équilibre très aléatoire entre romance et pur film de genre, Patrick Tam tente d’agrémenter son film de beaux instants en suspend avec quelques fulgurances stylistiques qui permettent d'éviter de justesse de le faire sombrer dans le mielleux. Ce n’est malheureusement pas rehaussé par ses scènes de fusillade assez mollement filmées, même si plutôt violentes. Très oubliable pour les amateurs du genre. Mieux vaut se refaire les films cités au-dessus, qui eux ne cherchent pas à viser aussi haut, mais décuplent leurs effets par une grande maîtrise de la science du « déssoudage » en règle.

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le 23 janv. 2020

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