J'ai pêché.
PECCAVI
Depuis toujours, je voue une admiration sans faille à Jake Gyllenhaal. «Chouette !», me lancerez-vous. «Ca me fait une belle jambe !», m'assènera quelque vil manant. Sauf que je ne suis pas certain que ce culte ne s'opère pour de bonnes raisons, et pour cause: dans mon classement international des acteurs que je déteste le plus, les moulasses, il occupe depuis fort longtemps la plus haute marche du podium. Une performance, lui qui est entouré de spécimens comme Taylor Kitsch, Shia LaBeouf (on pourrait croire qu'un patronyme ridicule est nécessaire afin de figurer dans ledit classement), Ryan Gosling (la preuve que non). Cela étant, ce dernier perd régulièrement des places dans la hiérarchie, son cas est donc des plus encourageants. Il a d'ailleurs marqué de gros points récemment avec The Nice Guys faut dire. Et puis ce n’est pas tant une moulasse qu’un poulpe dépressif à qui l’on a demandé d’incarner une huître, si l’on en croit la légende. Du coup est-ce que je l’inclus dans mon classement ? La question est posée. Bref. Brokeback Mountain, Zodiac, Prince of Persia. Plus d'une fois, Jakouille a prouvé qu'il savait être cet acteur lambda, donnant vie à des personnages lisses, sans épaisseur ni charisme, au point de se faire bouffer à l'écran par Heath Ledger - chose plutôt aisée, j'en conviens - son partenaire cowboy d'un film, ou quand "Joker" devient "j’écoeure". Même Downey Jr ou Mark Ruffalo lui roulent dessus dans le polar culte - pour certains - de David Fincher, c'est dire.
Oui mais.
MUSSEL, MUSE ET HOMME
Dans mon marathon de la moule, vlà t'y pas que je tombe sur Night Call. Déjà, en ce qui concerne l’œuvre elle-même, pour une première réalisation, on notera que Dan Gilroy s'en sort infiniment mieux que son frère - qui a dit «c’est pas dur» ? Personne ? Zut, j’ai dû une nouvelle fois le penser trop fort - à qui l'on doit notamment le très dispensable quatrième volet des aventures de Jason Burne (celui avec Moulasse numéro 4, j’ai nommé Jeremy Renner). C’est propre, quelques bonnes idées de-ci de-là même si le tout n’est jamais vraiment flamboyant. Si le trait est parfois un brin forcé au niveau de certains personnages - à l'image de l'obsession de Lou pour Nina pas toujours très bien amenée - force est de reconnaître que la mise en scène efficace, bien aidée il est vrai par une bande son aux petits oignons, ainsi que l’intensité dans le jeu des acteurs, fait qu’on ne voit pas passer les deux heures de film. «Quid de notre chère Moulasse numéro 1 ?» me demanderez-vous. Il est inutile de faire durer le suspense - car j'aurais pu digresser bien plus longuement croyez-moi, mais vu que je suis cramé quasiment depuis le titre du présent texte, allons à l'essentiel. En un mot, ma léthargie laisse place à une liturgie. Sous son air ingénu, le marionnettiste divin Jake et ses yeux de merlan frit expressifs pour une fois, place ses pions afin de faire main basse sur la télévision. Durant sa quête malsaine de sensationnel, le Los Angeles nocturne devient Los Demonios tandis que le Diable s'habille en kafka. Lou aura plus d'une occasion de se retrouver en cage, aussi, parviendra-t-il à tenir tête à la meute assoiffée ?
Une excellente surprise que ce Night Call, car entre un acteur que je déteste habituellement et une première réalisation de la part du frère cadet d'un bras cassé, il y avait matière à passer un mauvais moment. Il n'y a que les imbéciles qui ne changent pas d'avis, me souffle-t-on. Je suis la preuve vivante que cet adage est faux, un imbécile PEUT changer d'avis. Il me tarde donc à présent d'être impressionné une nouvelle fois par Le Magnifique. Cette fois marginal à la Bébel, devenu pour l'occasion "Moulasse des as".