Je m'en rappelle comme si c'était hier. La première fois que j'entendis parler de ce film, c'était dans un magazine de vacances qui disait ceci:
Si Peter Pan et Capitaine Crochet n'ont pas changé, la suite de leurs aventures devraient se dérouler à nouveau au Pays Imaginaire avec les enfants de Wendy.
J'avais beau avoir 12 ans à l'époque, un profond sentiment de nostalgie m'envahissait alors.
Peter Pan est certainement le conte de fées dont l'adaptation en dessin animé m'a fait le plus rêver durant mon enfance.
Loin de la noirceur et de la profondeur psychologique du roman de J.M. Barrie, le long-métrage animé des studios Disney était au contraire une comédie hilarante de bout en bout. Même le plus sombre personnage de l'œuvre de Barrie, le plus-que-célèbre Capitaine Crochet, devenait un être mi- sérieux mi-comique donnant naissance à des situations gaguesques et burlesques du plus bel effet. A côté de ça, c'est certainement l'un des plus vieux films dont je serais capable de réciter les dialogues par cœur.
Mais surtout c'est l'un des Disney dont la magie opère sur un terme d'une longueur impressionnante: tout le monde se souvient de la scène où les jeunes héros survolent les cieux de Londres sur le magnifique You can fly d'Oliver Wallace, personne n'a pu oublier le mythique Pays Imaginaire, dépaysant à un point que Harry Potter, Le Seigneur des Anneaux ou même Star Wars n'ont pu égaler (et ce malgré leur aura monumentale), chacun a rêvé un jour de jouer à cache-cache avec les Indiens, de rencontrer les merveilleuses sirènes de la lagune et bien sûr de croiser le fer avec les terribles pirates. Et que dire de Clochette, qui n'est devenue rien de moins que le symbole le plus célèbre de la firme aux longues oreilles depuis !
On en a donc presque les larmes aux yeux en voyant cette introduction sublime qui reprend, sans en oublier un seul, tous les ingrédients cités plus haut (musiques comprises), avant de terminer sur son personnage éponyme emblématique: l'éternel enfant en personne.
On sourit de plaisir en constatant que la voix d'Hervé Rey, l'homme qui s'était déjà fait entendre dans la version française de 1992 (après un second doublage), n'a pas pris une ride.
On éprouve quelque chose lors des courtes mais émouvantes retrouvailles entre Wendy et Peter, plus de 30 ans après leur plus grande aventure (50 en réalité).
En clair, cette suite tardive d'un des plus grands chefs d'œuvre de Disney (et l'une des rares à être sortie au cinéma, ce qui n'est pas rien) avait en elle quelques excellents ingrédients pour réveiller l'enfant rêveur en nous, la première étant la nostalgie et la magie du passé.
Car question nouveautés, il y avait aussi des idées intéressantes: reprendre par exemple la morale du premier opus (stop les enfantillages, il faut songer à grandir), cette fois-ci incarnée non pas par le personnage du parent mais par l'enfant lui-même ! En effet, la jeune Jane, fille aînée de Wendy, ne croit plus à ces contes de fées que lui raconte sa mère et s'efforce au contraire d'agir et de se comporter comme une adulte. Si l'on ajoute à cela que l'histoire se déroule dans le sombre contexte de la Seconde Guerre Mondiale au cœur de laquelle le personnage du père est envoyé combattre (on imagine le pire à ce moment-là), il y a de quoi créer une évolution et des situations psychologiques croustillantes.
La scène de la capture de Jane par les pirates est certes invraisemblable mais plutôt réussie et spectaculaire. On constate également une modernisation des techniques d'animation à travers l'usage de la 3D sur des paysages en 2D, notamment avec le Jolly Roger, le fameux navire de Crochet (chose qui ne plaira pas à certains, mais est acceptable dans mon cas).
Hélas, comme d'aucuns l'ont assez dit dans leurs critiques, toute l'action se déroulant au Pays Imaginaire est bourrée de défauts et de potentiel gâché.
Scénario tenant sur un ticket de métro, enfants perdus insupportables et braillards, chansons absentes ou oubliables, répétition de certains gags du premier (comme la première confrontation entre Crochet et la pieuvre) qui feront bien moins Mouche, morale lourdingue et assommante, sans oublier que beaucoup (dont moi) regrettent, à juste titre, l'éviction du cultissime Crocodile Tic-Tac, sans conteste un des meilleurs personnages du premier film, au profit d'une pieuvre orange bien pauvre en charisme.
Malgré quelques prises de risques qui n'iront pas bien loin (comme celle de mettre Peter en position réellement délicate, pour une fois), l'esprit d'aventure et d'insouciance qui se dégageait de son illustre aîné est aussi ce qui manque cruellement à Peter Pan 2. Quand en plus certains personnages perdent l'étincelle qui faisaient d'eux les éléments les plus divertissants du premier film, on est déçu: Crochet n'est plus qu'un mauvais perdant geignard et pathétique sans une once de charme et de machiavélisme, Mouche un figurant blasé sans la moindre conviction ou gaffe mémorable.
De plus, on aurait tant aimé voir Danny, le jeune frère de Jane, embarqué lui aussi dans l'histoire et intégré à celle-ci comme le furent efficacement les frères de Wendy autrefois. D'une façon ou d'une autre c'était faisable. Et bien non. Le gamin reste à Londres tout le long du métrage, se contentant seulement du récit des aventures de sa sœur à son retour... Frustrant.
Return to Neverland n'est en définitive ni un bon ni un (trop) mauvais film. Un pari audacieux qui aurait pu donner une excellente suite si ses bonnes idées avaient été poussées jusqu'au bout, tandis que ses plus mauvaises auraient été mises de côté. On éprouve un peu de nostalgie, qui fait passer la pilule plus agréablement, et apprécie une fin heureuse ainsi qu'un retour en enfance qu'on ne saurait refuser, mais ce n'est clairement pas là la meilleure aventure de notre cher Peter, encore moins la meilleure suite d'un film Disney... sans toutefois être la pire.