ATTENTION SPOILERS
Je crois que si l'expression "GROS FOUTAGE DE GUEULE" pouvait être mise en images, elle ressemblerait à ce film.
Le pire c'est que ça démarrait pourtant très bien : un Reed Richards enfant aux allures de Peter Parker qui invente la téléportation dans son garage, avec un couteau suisse, quelques câbles et une manette de N64. De quoi ravir le geek en chacun de nous.
La suite n'est pas en reste : entrées en scène de Miles Teller qui n'a rien perdu de son talent et de Jamie Bell qui, s'il se fait plus discret, est tout aussi plaisant à revoir. Arrivée au Baxter Building, présentation du fameux projet, introduction du reste de l'équipe... La formule est simpliste, voire bon enfant, mais moderne et facile à suivre. Exit les conversations scientifiques incompréhensibles et les blagues guignolesques de qualité douteuse, ici c'est un jeune étudiant ambitieux qui est aux commandes et ses équipiers ne sont ni plus ni moins qu'une bande de potes à l'alchimie plutôt agréable. Même Victor Von Doom, relooké en post-adolescent incompris et solitaire, paraît presque sympathique...
Et puis arrive la scène fatidique de l'accident.
Si l'on passera l'éponge sur la façon curieuse et vite expédiée par laquelle nos quatre lascars héritent de leurs pouvoirs (la palme revient quand même à Susan, irradiée alors qu'elle ne prend même pas part à l'expédition), la seconde partie du film est un foutage de gueule dantesque. Ou comment justifier par une ellipse d'un an que nos héros aient appris à maîtriser leurs pouvoirs qui à peine une minute plus tôt les effrayaient (la scène où ils réalisent l'étendue des dégâts, elle, s'en tire plutôt bien), que la Chose soit devenue une arme au service du gouvernement, que Reed lâche ses potes pour ensuite se réconcilier avec eux comme si de rien n'était, et que Von Doom émette le souhait ô combien prévisible d'anéantir la Terre pour bâtir son propre monde.
Ce qui donne lieu à la seule scène d'action de plus de 10 secondes du film, où nos héros se battent avec des cailloux dans la 4ème dimension, évitent la catastrophe en un temps record d'une minute, font un gros doigt à l'armée et au gouvernement (ce qu'ils auraient pu faire des lustres plus tôt), partent s'installer dans une pseudo base scientifique située dans le trou du cul du monde et trouvent leur nom d'équipe sur un coup de tête...
De deux choses l'une : soit le réal est talentueux mais a très mal exploité son potentiel, soit les producteurs se sont dit "Vous savez quoi ? On va pas se faire chier et couper une heure de montage au film ; parce que tout ce qui compte au fond c'est de conserver la franchise, et parce qu'on est des gros connards avides d'oseille" avant de se fendre d'un rire sardonique. La bande-son est transparente - alors qu'on nous annonçait une collaboration alléchante entre Marco Beltrami et Philipp Glass -, et ne comptez même pas sur un caméo de Stan Lee ou une scène post-générique pour sauver les meubles, ce serait trop beau.
Mais surtout pourquoi, au grand pourquoi avoir fait de nos Quatre Fantastiques des êtres aussi insipides et inintéressants ?!? Excepté Richards (qui s'en tire bien sans pour autant être un modèle d'originalité) et Von Doom (qui pète la classe dans ses dernières scènes), on ne peut pas dire que le reste de l'équipe brille de profondeur ou de vertu : Johnny sort quelques vannes qui ne font même pas mouche, Ben passe en 2 secondes du statut de meilleur ami mutique dont on-ne-sait-rien à celui de grosse brute de service (sa fameuse réplique "It's clobberin' time !" sort de nulle part), Storm est un père indigne qui favorise sa fille adoptive, délaisse son propre fils et n'a d'yeux au final que pour son projet dément... Quant à la femme invisible, on peut dire qu'elle n'a pas démérité son surnom. A part soulager les hormones des deux intellos, sa seule utilité se limite à pianoter avec du Portishead dans les esgourdes tout en livrant son "copain" aux autorités... Néanmoins, ce n'est sûrement pas le joli et froid minois de Kate Mara qui fera la différence.
Après un gâchis pareil, l'avenir cinématographique de la franchise me paraît fort mal barré, Fox entendant bien conserver la poule aux œufs d'or (comme si les X-men ne leur suffisaient plus) et ayant d'ores et déjà annoncé la suite pour 2017. Reste plus qu'à croiser les doigts pour que cette mascarade ne dure pas...
EDIT : Après vérification, il semblerait que la faute vienne bien de la prod et non du réal, qui s'est expliqué dans une lettre adressée au public : https://dunnozmovie.wordpress.com/2015/08/12/les-4-fantastiques-la-lettre-ouverte-et-amere-de-josh-trank/