Dans l’univers des franchises qui s’éternisent au cinéma, il existe deux cas de figure. Le premier concerne celles qui, quelque que soit la qualité du nouvel opus, possèdent un aura si indélébile qu’il est quasiment impossible de passer à côté (Star Wars, Terminator, Mission : Impossible…). L’autre touche celles qui commencent par un film fort sympathique mais qui persévèrent dans des suites tout en perdant l’intérêt du spectateur au point de tomber très vite dans l’oubli. La saga Underworld est clairement de ce genre-là. En effet, hormis un premier opus divertissant, qui se souvient de ses séquelles ? Pas grand monde, il faut bien l’avouer… Même le quatrième film, intitulé Nouvelle Ère, à défaut de se montrer original, avait fait preuve d’une très grande efficacité sans toutefois parvenir à remettre la franchise sur le devant de la scène. Autant dire qu’à part quelques aficionados, personne n’attendait ce cinquième épisode, un temps évoqué pour finalement rester dans l’anonymat le plus certain jusqu’à sa sortie en salles. Et le moins que l’on puisse dire, c’est qu’il n’aurait jamais dû faire parler de lui…
Dans toutes les sagas qui existent, toutes connaissent le film de trop. Celui dont personne ne voulait et qui, au grand dam du public, démolit tout le travail accompli jusque-là. Underworld : Blood Wars est, pour la saga initiée par Len Wiseman en 2003, cet opus parasite venant saccager ce qui restait du capital sympathie de l’ensemble. Le scénario en est la première victime ! Si la franchise n’a jamais été un modèle en matière d’écriture, ne comptant que sur son univers et l’action, il y avait suffisamment de matière pour capter l’attention du spectateur. Même Nouvelle Ère, qui tentait tant bien que mal à tout relancer, s’en sortait avec le minimum syndical. Blood Wars, par contre, se viande avec allégresse dans l’inutilité de bas étage. Sans s’éterniser sur des personnages totalement inexistants et se montrant avare en détails (pensant que le public ait suivi l’aventure de bout en bout), le long-métrage présente une intrigue qui parait bien vide. Surtout aux vues des enjeux présentés dans Nouvelle Ère, qui se devait d’être le point de départ d’une nouvelle trilogie. Ici, nous avons l’impression d’une histoire à part, servant plus d’interlude à un véritable cinquième opus. Qui n’apporte clairement rien de neuf à la franchise et qui est narrée de manière brouillonne (très mauvais montage) au point de perdre le spectateur, c’est dire !
En termes de mise en scène aussi, Blood Wars se présente comme le pire de ce qu'il se fait dans la saga ! Le fait que la cinéaste Anna Foerster, dont c’est le premier long-métrage, s’était auparavant illustrée dans la réalisation de seconde équipe (notamment sur Alien 4, Le jour d’après ou encore 10 000) et les effets spéciaux (Independence Day, Godzilla, Pitch Black et Stuart Little 2), a sans doute pesé dans la balance. Du fait qu’elle manque clairement d’expérience pour diriger un film. Mais Patrick Tatopoulos était également dans le même cas de figure, ce qui ne l’a pas empêché de livrer un troisième opus, Le Soulèvement des Lycans, douteux mais satisfaisant. Non, Blood Wars révèle à quel point Foerster n’a tout simplement pas de savoir-faire. D’une part parce qu’elle n’a aucune personnalité et filme le tout de manière bien trop classique. Ce qui atténue fortement le semblant d’ambiance qu’avait la saga jusque-là. Et surtout de l’autre, où elle parvient à faire perdre le charme de celle-ci, à savoir son énergie. Jamais des séquences d’action dans un film Underworld n’avaient été aussi molles, aussi « plan-plan » que dans Blood Wars, ne retrouvant jamais le panache de ses prédécesseurs. Se perdant même à montrer des effets numériques de bien mauvaise facture, alors que la franchise était reconnue pour ses maquillages et costumes faits à la main.
Après tout cela, nous ne pouvons finir la critique que par le casting, qui ne relève pas plus le niveau. Car si le film a beau se vanter de retrouver Kate Beckinsale en tête d’affiche avec l’excellent Charles Dance le temps de quelques minutes, il n’offre certainement pas les meilleures interprétations du moment. Que ce soit les seconds rôles tout aussi risibles que ridicules (Theo James, Tobias Menzies, Lara Pulver, Bradley James…) ou Beckinsale elle-même, qui a littéralement perdu de son charme (elle a beau être à nouveau vêtue de sa combinaison en cuir moulant, elle n’est plus aussi charismatique qu’auparavant), toute la distribution du film n’est vraiment pas des plus fameuses. Renforçant pour le coup l’impression d’avoir un épisode de plus dont tout le monde se fiche, mais qu’il fallait faire au moins pour toucher de l’argent.
La fin de Blood Wars annonce une suite. Mais verra-t-elle vraiment le jour ? C’est toute la question que l’on peut se poser en voyant ce film, qui enfonce la franchise encore plus dans l’oubli (alors que Nouvelle Ère avait réussi à relever le niveau). Si les critiques ne sont pas tendres avec lui et ce à juste titre, ses recettes ne le sont pas pour autant : pire score au box-office de la saga Underworld, que ce soit en France ou bien aux États-Unis. Avec pareil constat, la franchise touche sans doute à son terme et ce à cause d’un film qui réduit à néant ce qui pouvait en rester de sympathique. Si un sixième opus voit le jour, il devra déjà assurer sa promotion pour se faire connaître ne serait-ce un minimum pour déterrer la saga dans l’inconscient collectif. Sa qualité, bonne ou mauvaise, fera le reste.