Je voulais depuis longtemps écrire un petit bout de quelque chose sur Anderson, ce type qui a une aptitude folle à te sortir du quotidien en te fixant un sourire enjôleur jusqu’aux oreilles. Alors, tandis qu’une agitation palpable émane d’un hôtel budapestois, je profite d’une virée chilienne des propriétaires afin d’apprécier tranquillement le trip indien de 3 frères, m’enquillant une pizza bien loin d’être italienne dans un canapé tout ce qu’il y a de plus suédois.
Une histoire de train rouillé qui donne une subite envie d’aimer, avec ses fresques pachydermiques, son orientalisme coloré et son atmosphère de souk qui te transportent dans l’euphorie la plus complète, c’est ça, Darjeeling Limited.
Mais c’est surtout ça Wes.
3 frères qui s’aiment évidemment plus que tout au monde mais qui dans leur apparente légèreté trimballent une lourdeur mélancolique, un truc qui se lit sur leur visage, un truc profond, comme un petit pois sous un matelas, qui les empêche de profiter pleinement de leur fraternité. 3 inconscients peu soucieux de leur image, décalés, qui partent dans un pèlerinage pour la reconquête de l’amour. 3 vies de merde qu’Anderson s’évertue à rendre enviable, comme pour nous montrer qu’on peut avoir la même vie que dans les films.
C’est toujours pareil, il met en scène des dépressifs dans un décor thématique, et les fait cohabiter, dans une tente, dans un train, dans un terrier, mais toujours avec cet objectif de les rendre heureux, de les amener vers l’inévitable amélioration de leur situation.
Finalement, si on aime tant Wes Anderson, si ses films ont un tel pouvoir euphorisant, c’est peut-être bien parce qu’il nous rassure, qu'il prend les sentiments les plus primaires et parfois les plus détestables pour les colorier. Et parce qu’il nous convainc que même un train peut se perdre sur ses rails, parole de scout.