"A bout de souffle" de Godard, décrit par son partenaire de la nouvelle vague, Truffaut , comme étant "le chef-d'oeuvre qui lança la carrière de Godard", n'a pas du tout fonctionné sur moi. Bien que très singulier, ce film de la nouvelle vague n'a pas su me transporter vers les paysages du vrai cinéma, comme le voudrait la pensée commune.
Ce film veut jouir d'une certaine forme de liberté: la même forme de liberté futile qui prend uniquement du plaisir dans le fait de s'opposer et de déconstruire aux principes déjà établis, sans vraiment apporter d'éléments concrets pour les remplacer.
Cette volonté, symptomatique de la Nouvelle Vague du cinéma français, se retranscrit parfaitement sur ce film. Un montage décousu, qui laisse place à une arythmie à la limite du supportable. Les plans qui se coupent trop tard ou trop tôt, les dialogues parfois stériles,... Tout le film respire la légèreté, la fougue de la jeunesse représenté par l'affranchissement des codes sociaux (ici du cinéma traditionnel, vous l'aurez compris).
Le long-métrage paraît donc comme unique, et ne ployant le genou sous aucune autre influence; Cependant, on peut y déceler une certaine influence du "film noir" américain.
En effet, "A bout de souffle est sorti 10 ans après l'âge d'or de ce courant artistique, et certains éléments semblent concorder. La présence de la femme fatale, que l'on peut aisément lier à Jean Seberg: elle a un effet dévastateur sur le héros principal, qui fait une halte dans sa cavale avec la police pour espérer coucher une dernière fois avec cette femme. Elle est (indirectement) porteuse de problème, et semble dominer Belmondo du bout du nez. Belmondo, quant à lui, semble fuir une funeste destinée, qui arrivera forcément tôt ou tard. Tout le long du film, on remarque l'évolution (qui passe d'ailleurs au second plan de l'histoire) de la traque du héros, Michel Poiccard. Le fait de fuir un destin tout tracée est aussi caractéristique du courant artistique de l'après-guerre américaine.
Une séquence du film est néanmoins remarquablement agréable. Les deux personnages principaux qui justifient le côté "libre" du film, lorsqu'ils sont tout les deux seuls dans une chambre d'hôtel. Là les actions et les dialogues inutiles prennent tout leur sens, rendant l'ensemble de scènes comme un moment suspendu dans le temps. On nous montre simplement deux personnes qui se laissent couler au rythme de l'amour, brisant le brouhaha du dehors , entendu en guise de fond sonore. Même l'annonce de grossesse de Patricia Franchini (Jean Seberg) semble passer inaperçu, se fondant dans l'onirisme de l'instant.
La deuxième note positive du film se situe à sa fin (dommage!) : La police finit par le rattraper, mais Belmondo ne veut plus se battre. Il refuse aussi l'arme que lui tend son camarade de la pègre, voulant faire face courageusement a la menace qui le guette, restant fidèle à ses principe du mépris de la lâcheté. Très bien écrit.
Finalement, bien que le charisme et le talent de Belmondo se fait ressentir dans sa filmographie, il n'a pas su rattraper le propos superficiel du film. Pour moi, il déconstruit en ne rebâtissant rien derrière , laissant derrière lui un tas de gravats qui n'exprime pas grand-chose.