Les épaules solides de Gian Maria Volonte, le charme farouche de Irene Papas et la classe à l’italienne de Gabriele Ferzetti, voila le petit secret de A chacun son du, un whodunit rital qui brillotte par le coup d’œil acerbe de son metteur en scène. Comme à son habitude, Elio Petri croque ses contemporains avec une mine particulièrement affûtée, rompue à l’exercice d’un trait rigide qui ne connaît pas le compromis.
Sous ses faux-airs de whodunit classique, A chacun son du brosse le portait peu glorieux d’une Italie traditionaliste qui préfère les œillères à la conciliation. Les âmes pures en quête de vérité finissent dans les gravats d’une mine abandonnée alors que les notables usent de leur pouvoir pour modeler la société qui les fait vivre à leur juste mesure. Petri n'adoucit son propos à aucun moment et conclut son film de la meilleure des manières, sans espoir ni procès d’intention : son dénouement, si noir soit-il, s’ancre dans un réel bel et bien palpable, de quoi frissonner.
Pour le reste malheureusement, la platitude de la mise en scène étonne quelque peu, La dixième victime qu’il avait tourné 2 ans auparavant fait meilleure impression ; et on est loin de l’inspiration graphique dont fera preuve le bonhomme quelques années plus tard dans Enquête sur un citoyen au dessus de tout soupçon. Sa direction d’acteur redoutable est par contre bien de la partie : Gian Maria Volonte trouve encore le ton juste et ses acolytes sont d’un croustillant à toute épreuve, à l’image du petit mafieux sans scrupule auquel Gabriele Ferzetti prête ses traits.
Mais celle qui fait tourner toutes les têtes, c’est la belle Irene Papas qu’Elio Petri met superbement en valeur —de quoi raviver mon intérêt pour la découverte de Z—. Tour à tour tiraillée entre des intérêts personnels parfaitement calculés et ses propres désirs charnels qu’elle a bien du mal à gérer, elle est véritablement le point de pivot de A chacun son du, qui, plus qu’un film policier revendicateur, se trouve finalement être un beau portrait de femme.