Quelque-part entre “Mange tes morts” et “Le Temps des Gitans”, “A Ciambra” est une plongée hyperréaliste, crue et brutale dans la marginalité d’une enfance gitane. L’école, le talc et les joues rosées appartiennent aux gadjés du monde. Ici, il y a Pio et la smala Amato. Illettré, effronté, cigarette au bec, 14 ans, vols à la tire, maraudages et braquages de véhicules, il répète les frasques du frère. Et puis il y a la mère, la tzigane dépossédée lorsque les carabiniers déciment le sérail. Pio devra honorer ses pairs, sa mère et devenir un homme; un homme un vrai, comme ils disent, et ce jusqu’à la piaule d’une Mado. Lorsque que la loyauté engendre la trahison, le film déroule une dialectique insoluble. Sur fond de communautarisme, les frontières se mêlent et là, l’initiation sera incisive.


La magie de Jonas Carpignano est de conter des histoires au-delà du film. Il y a Koudous Seihon (Ayiva), un exilé burkinabé repéré dans dans un rassemblement d’immigrés puis la famille Amato. Quelques années auparavant, sur un tournage, le réalisateur se fera voler sa Fiat et si l’on veut discuter charrettes à Gioia Tauro, il faut aller voir les gitans. Des rencontres comme autant de sources d’inspiration pour son court-métrage d’abord, puis “Mediterranea” et ici, “A Ciambra”. Proche du documentaire, la direction des acteurs non professionnels de la famille Amato est cinglante de sincérité. La figure angulaire de Pio est époustouflante. Le film regorge d’une générosité délicate mais gargantuesque. Quelques longueurs regrettables, des incohérences passagères, mais des envolées sublimes et une justesse remarquable. C’est drôle … coproduit par Martin Scorsese, le film rappelle un Sergio Leone, le dernier. Des histoires de bandits maudits, brûlantes, sanglantes … Bref, il était une fois en Calabre.


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guardianalfred
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le 13 oct. 2017

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