Le prémisse est intéressant, pas nouveau, mais intéressant.
C'est sensé être un whodunit classique, volontairement classique, rappelant ainsi Agatha Christie (avec le détective brillant mais un peu excentrique) et le cluedo avec la grande maison et les suspects multiples qui l'habitent.
Et au début, c'est bien le cas.
Le Docteur Lenoir est mort dans le bureaux avec le couteau : en l'occurrence, Harlan Thrombey, auteur de roman policier à succès a été retrouvé la gorge tranchée dans son bureau après sa soirée d'anniversaire. Les enfants et petits-enfants, tous plus suspects et antipathiques les uns que les autres, ainsi que les employés, sont interrogés. La première conclusion est celle du suicide mais le grand détective Benoit Blanc a été engagé anonymement pour enquêter sur cette mort, ce qui sous-entend un soupçon de meurtre.
Les divers témoins font leur déposition qui entrent en contradiction de manière assez heureuse avec les flashback montrés à l'écran. Tout baigne dans la famille mais rien ne baigne en vérité et chacun a une raison et une opportunité de tuer le vieux monsieur.
Et puis patatras, l'intrigue se centre tout à coup autour de l'infirmière, Martha, une fille vraiment gentille (c'est son personnage, elle est gentille), une lumière au centre de toute cette noirceur, et le détective déblatère des propos incohérents qui sont sensés être intelligents.
40 minutes dans le film, la solution est donnée, méprisant copieusement tout le build-up accompli jusque là. Le film change d'objet et devient une course contre la montre pour cacher la culpabilité du coupable (présumé, c'est tout de même difficile à avaler) pour finir à 20 minutes de la fin par sortir un retournement de situation à peine préparé (mais un peu quand même, je le reconnais, il y avait quelques minuscules miettes cependant) et peu surprenant.
C'est assez typique de Rian Johnson pour ce que j'ai vu de lui : il a fait pareil dans l'Episode VIII de Star Wars. Il est parti sur des pistes sans fin, sans but, pour atterrir à un endroit qui n'a rien à voir.
Il a de bonnes idées mais il n'arrive pas à les tenir et veut faire différent pour ne pas faire pareil juste pour être différent mais ses scénarios sont des châteaux de cartes branlants.
C'est d'autant plus dommage qu'il a un casting plus que compétent et sous utilisé puisque TOUS les suspects sont exonérés dès le départ (et le retournement de situation de la fin ne les remets pas en ligne de mire non plus). Ces personnages sont bien joués et intéressants et ils ne servent à rien qu'à hurler par moment.
Quand à son super détective, on nous le dit qu'il est super mais on ne sait pas pourquoi. Il veut tellement le rendre mystérieux et étrange que le personnage est obligé de nous dire qu'il avait tout compris depuis le début mais qu'il n'a rien dit juste parce que. Mais c'est facile de dire "je savais tout" quand tout est fini! Je peux le faire aussi et être le plus grand détective du monde! Si ça ne se voit pas à l'écran, c'est que c'est un crétin qui a du bol!
Daniel Craig en fait des caisses avec l'accent du sud et les envolées lyriques mais son visage granitique habituel ne cohère pas. Bof et rebof.
Ana de Armas est charmante et joue bien un rôle pas plus multidimensionnel que les autres.
Jamie Lee Curtis, Toni Collette, et Don Johnson sont eux totalement brillants et charismatiques et c'est du gâchis.
Michael Shannon est étrangement brouillon.
Chris Evans est totalement transparent.
Christopher Plummer est toujours un plaisir à voir et est très bien dans le rôle pas compliqué de la victime.
La réalisation se veut originale et pleine de trouvailles mais si on enlève des plans inutiles sur des animaux empaillés et des gros plans disgracieux, elle n'a rien de mirobolant.
Un gros gâchis de bonnes idées et d'un bon casting et un ressort scénaristique emprunté à la Cité de la Peur qui aurait dû y rester.