D’après Wang Bing, À l'ouest des rails, 2004. Je ne me sens jamais justifié d’écrire à partir d’un film par contre les documentaires sont des prises de scènes du monde à l’état brut, à moi de les transformer.
Assourdissement continu de l'usine, le monde ne se repose plus.
Le plus grand rêve de ces ouvriers n'est pas de changer de vie mais d’avoir deux semaines de congé supplémentaires de temps en temps, une décennie par-ci par-là.
Si soucieux des températures des machineries que par dégoût de la frilosité de la fonderie ils ne se soucient plus trop s’ils ont eux même chaud ou froid.
La fonte doit être parfaite mais peu importe si les bâtiments de l’usine se détériorent tant qu’ils continuent de faire leur job de se tenir droit.
Brouillard persistant, dehors comme dedans, le ciel n'est plus qu’un vague souvenir.
Bienvenue dans la matrice secrète du nouveau monde, portez un casque et ne fumez qu’en cachette.
Ces hommes finiraient presque par oublier qu’il manque la femme dans leur univers, s’ils n’avaient pas leur pénis à vider.
Ils n’assistent qu'à la création de la fonte, sans savoir ce qu’elle deviendra. Masse de fonte informe qui se compte en tonnes et semble être expédié dans un vaste trou quelques part où elle sera enterrée en offrande à la Terre.
Pas de contre-maître en vue, tous ces ouvriers semblent autonomes mais enchaînés à leur travail, ne sortant jamais, faisant leur pause clope à l’intérieur.
Ils règnent sans partage sur ces palais d’acier que l’univers ne découvrira jamais, se promenant le long de ces machines immenses, qui ne leur survivront pas.
Maintenant que la majeure partie des ouvriers sont déjà partis, ceux qui restent ne pensent même pas à s’aventurer dans les vestiaires et parties communes qui ne leur étaient pas dédiés et qui sont maintenant vides, une grande partie du bâtiment est désert et personne ne veut être le fantôme qui hante.
Jouer avec le feu est une expression kils ne peuvent plus comprendre.
Un masque sur la bouche jusqu'à la retraite.
Même en Chine les ouvriers craignent les fermetures d’usines, et puis, le monde finira bien par ralentir sa folie de construction, quand il y aura plus de logements que d’humains.
La seule manière de ne pas se blesser est de rester les deux pieds dans la routine des gestes. Un pas de rêverie pendant le travail est la brûlure menace.