Depuis le déparquement de la baie des cochons, les tensions soviéto-américaines sont très fortes. Les deux factions usent mutuellement d’un manque de confiance et se méfient l’un de l’autre. Lors de ce long épisode de paranoïa, un capitaine fou au commande d’un puissant sous-marin nucléaire russe agresse les USA. Soviétiques et Américains se lancent alors à sa poursuite et tente de comprendre son comportement.
La course à la liberté
Dans cette période de tensions, Soviétiques et Américains voient l’un chez l’autre un envahisseur néfaste. La citation « L'herbe est toujours plus verte dans le pré d'à côté » n’a jamais eu autant sa place dans un film. En effet, le film dépeint une manière de percevoir l’autre comme étranger. Soit parce qu’il est dangereux et lui veut du mal, soit par la naissance d’une perception envieuse en fantasmant sur les terres et les privilèges de l’autre. Souvent sur la base de bien peu de choses, les deux camps et leurs représentants nourrissent fantasmes ou colères.
Cette logique mortifère est la base même du récit du film. A l’instar de Point d’Impact (1964) avec Henry Fonda et sous la direction de Sidney Lumet, Le récit rappelle à quel point il est aisé dans ce monde de faire renaître les rancunes de deux vieux titans atomiques. Un discours rappelant la menace sourde, mais bien présente et omniprésente qui perdure encore. Une œuvre ouvertement idéologisée qui veut apporter un message des plus inquiets par la représentation certes d’un conflit entre deux puissances mondiales, mais qui peut aisément s’élargir à tous les conflits petits et grands. Tantôt dans une ambiance suffocante et claustrophobe dans le sous-marin, tantôt dans les bureaux des décisionnaires, le comportement du capitaine d’Octobre Rouge soulève les débats et alimentent les peurs. L’objectif ? Administrer une leçon magistrale sur le thème de l’altérité face à l’ennemi.
La fin de l’héroïsme
L’impérialisme américain, de même que l’héroïsme et le patriotisme de cette nation, ont souvent été le théâtre d’une mise en scène virile et puissante remplie d’un excès de testostérone. Souvenez-vous de John Wayne, de Clint Eastwood, ou de Arnold Schwarzenegger, des figures masculines fortes qui suintent toute la force du guerrier américain. Il y a quelques années déjà auparavant, John McTiernan était déjà le petit malin qui s’amusait à détruire de l’intérieur la création de telles idoles. En effet, avec Piège de Cristal le réalisateur mettait en avant un autre genre de héros, qui saigne, fume, et jure, qui n’est même pas invulnérable et qui doit sa survie à un facteur chance indéniable.
Quand sort A la poursuite d’Octobre Rouge, le réalisateur réédite l’exploit et s’engage à malmener le genre du film d’action et à détruire en profondeur l’image de l’héroïsme telle que nous la concevons. On présente souvent le héros par rapport à sa capacité à être violent face à l’adversité, jusqu’à la battre et la détruire. Dans ce film, les personnages violents ne sont pas des héros. Plus un personnage est calme, plus ils se rapprochent de l’héroïsme. C’est peut-être la seule véritable version possible de l’héroïsme, celle où nous ne sommes pas érigés en idole parce que nous avons su vaincre l’ennemi dans une bataille acharnée, mais parce que nous avons su faire la paix et éviter l’affrontement. N’est-ce pas au final, une plus belle version de l’héroïsme que celle qui permet d’éviter la guerre et donc des pertes inutiles ? Celle d’un homme qui, plutôt que de tirer et tuer, préfère songer au poids de ses conséquences et agir avec sagesse et discernement ?
Cessez le feu !
Car c’est bien le message pourtant élémentaire du film : cessez le feu. Un rappel à l’obligation d’analyse, de calme, et de finesse dans les conflits. Les héros à l’image de John Wayne ne sont plus, le vrai héroïsme s’appelle dorénavant Sean Connery.