Cette production Disney est un spectacle réjouissant super bien rythmé, drôle, émouvant, trépidant, bourré d’idées référentielles, tout cela animé par la patte singulière et personnelle de Brad Bird. On se délecte de la précision de la réalisation (surtout son sens de l'espace dans le cadre !), de ses passions vibrantes et récurrentes qui traversent toutes ses oeuvres (Paris, les robots en tout genre !, etc), et de ses personnages très proches par moment de ses films d’animation dans leur comportement et leur dynamisme : il aime en effet les faire voltiger, booster leur capacité physique et les maltraiter, toujours avec compassion, dans des chutes impressionnantes. Et puis il est difficile de ne pas penser aussi aux productions Amblin (1) de la grande époque avec cette alliance entre personnages attachants, univers fantastique et efficacité du récit.


Britt Robertson, interprétant Casey Newton l’héroïne du film, est impliquée comme peu d’actrice de son âge peuvent l’être. Impressionnante autant dans les scènes de comédie que dans les scènes d’action, on la sent vraiment investit physiquement et émotionnellement dans son personnage : avec ses airs de jeune femme volontaire, battante et énergique, difficile de ne pas penser à Jennifer Lawrence. On la suit du début à la fin dans ses aventures aussi spectaculaires que rocambolesques, les effets spéciaux et les décors futuristes proposant un univers des plus fascinants.


Casey Newton a typiquement le profil et le rôle d’un agent spécial. On peut dire qu’elle fait clairement écho à la filmographie du cinéaste, puisque Brad Bird tourna le dernier Mission impossible en date, en plus de donner du piment à ce récit d’aventure sans trop de temps mort ou les héros doivent sans arrêt échapper à leur poursuivant. Casey sera, de plus, repérée pour ses talents par un recruteur tout à fait atypique : sans dévoiler la nature d’Athena, dont le nom évoque déjà beaucoup de chose, la candide Raffey Cassidy incarne un personnage tour à tour innocent, charmant, énigmatique et vraiment surpuissant. Elle montrera l’étendu de ses talents dans de magnifiques scènes d’actions à couper le souffle !


Le récit entretient vraiment un suspense palpitant au fur et à mesure que les révélations tombent. Rarement le talent de conteur de Brad Bird, qui signe aussi le scénario (2), ne se sera autant épanoui que dans ce blockbuster familiale. Pourtant habitué à l’animation, je savais qu’il était un metteur en scène live très doué puisqu’il était, comme je le disais plus haut, derrière la caméra de Mission Impossible : protocole fantôme (2011), visuellement époustouflant et profondément immersif. On peut dire qu’il applique avec encore plus d’inspiration et de génie son travail du cadre, du découpage et de la profondeur de champ, car il prend un malin plaisir à jouer sur une dualité ludique ou deux réalités se chevauchent dans un même plan au contact du fameux pin’s magique.


Sa maîtrise des effets spéciaux est toujours au service de l’histoire, son plaisir de mixer images réelles et images de synthèses est vraiment communicatif, et jamais il n’utilise ces dernières juste pour l’esbroufe : à ce titre, le passage de nos héros à Paris et l’utilisation qu’il fait de la tour Eiffel est un grand moment d’anthologie qui, en tant que français, ravie autant nos sens que notre imagination. Symboliquement, cette mise en image qui représente à la fois le monde des inventions, des sciences – monde rationnelle/image réelle – et celui de la science fiction, du futur – monde irrationnelle/image de synthèse, trouve une fluidité étonnante dans cet univers, tant il est parfois difficile de discerner ce qui réel et ce qui ne l’est pas.


Du début à la fin, le film nous embarque dans un voyage aussi haletant que surprenant, rythmé par des rencontres improbables et des personnages hauts en couleur. Ce grand 8 en 2D et sa tonalité parfois théâtralisé doivent sûrement au fait que le film est, à la base, une attraction du parc Disney. A la poursuite de demain parvient à restituer des émotions pures, intègres, et, fidèle à sa tradition, nous fait croire au Merveilleux dans le sens noble du terme.


De plus, on remarquera que la firme Disney fait des efforts pour moderniser ces thématiques. La famille et les bons sentiments sont moins au centre que dans ses autres productions, proposant une réflexion sur notre manière de vivre et une vision plus ou moins sombre que l’on peut se faire de l’avenir. Mais malgré un fond plutôt progressiste et en phase avec notre époque, je l’ai trouvé un peu démonstratif, limite barbant, dans sa morale sur la dernière partie. Ce sentiment de gène à même fini par grignoter – dans son final – l’euphorie ressentit pendant quasiment toute la durée du film.


Si les intentions sont louables, ces bavardages excessifs surlignent un discours qui s’imbriquait déjà parfaitement dans son intrigue et que l’on avait parfaitement saisit en tant que spectateur. En résumé, A la poursuite de demain est un beau et émouvant divertissement consommable sur place, offrant un lot enivrant de sensations fortes et d’images fabuleuses, mais qui hélas s’oublie très vite une fois sorti de la salle.


(1) – Société de production crée par Steven Spielberg, K. Kennedy et F. Marshall en 1981, à qui l’on doit Gremlins, L’aventure intérieure, Les goonies, Qui veut la peau de Roger Rabbit, les Retour vers le futur, etc


(2) – Co-écrit avec Damon Lindelof (Prometheus, Star Trek into darkness, World War Z, etc) et Jeff Jensen, qui n’avait encore rien écrit.

Mathieu_Babhop
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le 18 août 2016

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Harkento

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