A peine j'ouvre les yeux prétend dresser le portrait d'une jeunesse tunisienne au seuil de la révolte, mais s'engonce dans du cinéma social de bas étage. Ado au désir révolutionnaire bien superficiel, l'héroïne est aussi insupportable qu'une lycéenne se rêvant chanteuse contestataire de n'importe quel pays (pour un peu, on croirait avoir trouvé une Zaz beurette !). Ses confrontations avec sa mère sont aussi redondantes qu'improbables. Et le pire, c'est que la réalisatrice veut filmer si près son héroïne seule contre tout (parce que c'est comme ça que ça se fait dans les films engagés) qu'elle la coupe totalement du monde. Du coup, A peine j'ouvre les yeux fait tout sauf saisir le peuple tunisien assoiffé de liberté. J'ai attendu ardemment les concerts pour avoir enfin une interaction avec le monde, suivant l'élan de la chanteuse, sauf qu'on oublie de filmer le public, laissant les chansons sans résonnance. Après, on fait harceler l'héroïne par la police pour s'arracher l'attention du spectateur, mais l'ennui n'a que trop duré.
Je suis quand même gentil, et j'attribuerais volontiers ces défauts à des maladresses de premier film pour la réalisatrice Leyla Bouzid. Or, en attendant, A peine j'ouvre les yeux ne m'a fait que confirmer l'excellence d'un autre film : Les Chats Persans (2009) de l'iranien Bahman Ghobadi qui lui est vraiment un film jeune, musical et révolutionnaire.