Après avoir divagué dans les tréfonds de la réalisation outre-manche, Susanne Bier revient à ses premiers amours, au sol Danois. L'auteure qui nous avait déjà charmés avec les sublimes After the Wedding et Nos Souvenirs Brûlés revient cette année avec A Second Chance, un drame familial prenant qui creuse la notion de justice à son extrême.
La principale force de la réalisation de Susanne Bier est bien sa direction d'acteur. La multiplication des plans sur les visages, les jeux de regards, les réactions sincères et viscérales de ses personnages. Chaque apparition est maitrisée, taillée pour faire ressortir toutes les émotions induites par les situations, en digne héritage du Dogme 95 dont l'auteure garde une forte inspiration. Sans jamais entrer dans des jump cuts mal coupés ou désagréables, le montage offre un rythme haletant qui nous tient en haleine et transforme chaque scène en coup de poing ou en caresse.
En positionnant deux personnages diamétralement opposés, Susanne Bier tiraille nos sentiments et remet en cause la notion de bien ou de mal. Procédé déjà très exploité à travers ses œuvres (Brothers, After the wedding) mais qu'elle maitrise magnifiquement en jouant sur un droit fondamental de la nature humaine : l'erreur. Car ici, la caméra ne juge pas. Elle se place au milieu d'événements, elle les suit, les transcende, les perce. Le spectateur n'est qu'un témoin impuissant qui contemple et qui comprend. Qui comprend les choix irraisonnés d'un homme, partagé entre sa propre tragédie et celle d'un autre, qui comprend les choix d'une autre, hantée par elle-même.
A second chance est d'une violence crue, d'une poésie romantique. Chaque personnage qui compose le film nous fait vivre son quotidien. Les acteurs sont d'une justesse remarquable, qu'il s'agisse de Nikolaj Lie Kaas et sa gueule cassée qui casse des gueules ou de Maria Bonnevie, réincarnée en une Ophélie Shakespearienne dont la folie émane de chacune de ses pupilles.
Après les difficultés d'exploitation de son dernier film Serena, Susanne Bier revient au cinéma qu'elle maitrise le mieux. Celui qui parle des mœurs, de la manière dont un incident vient fragiliser tous les murets qui composent notre existence. Une narration habile qui verrouille chaque porte sans grande surprise et nous laisse quelque peu sur notre faim, sans pour autant empêcher le film de se propulser auprès des sommets de la filmographie de l'auteure.