Présenté au dernier festival de Cannes, A Serbian Film avait créé une polémique énorme, ayant choqué l'audience à un point tel qu'un potentiel distributeur était tombé dans les pommes, se cassant le nez par la même occasion (chochotte !). Il faut dire que côté dégueulasseries, 8MM et — la saga — Saw sont laissés — très — loin derrière. Je pourrais vous lister les horreurs que l'on y voit, mais hors de leur contexte elles n'auraient aucun intérêt et risqueraient de faire fuir inutilement l'audience.
Milos (Srdjan Todorovic) est une porno-star en fin de carrière, voulant décrocher une fois pour toutes, et devant subvenir aux besoins de sa femme et son fils il n'aura pas d'autre choix que d'accepter de tourner dans un film, pour une somme qui le mettra à l'abris du besoin jusqu'à la fin de sa vie, sans se douter quel en est le contenu, et à quel point il sera extrême. Reprenant une mécanique à la Saw (et un soupçon de Proposition Indécente), Milos étant obligé de faire des choses contre sa volonté, le film se révèle très bien ficelé et tortueux, nous dégoûtant tant les scènes deviennent de plus en plus glauques, voire vomitives, jouant la carte de l'immoralité, pédophilie et snuff étant de mise (le snuff movie est un genre cinéma porno dans lequel une femme se fait violer et tuer, mais aussi une légende urbaine, les meurtres étant toujours simulés).
Milos étant victime de machinations et abondamment drogué pour avoir des hallucinations, il tombera dans une spirale sans fin, et complètement perdu, toutes ses tentatives de rébellion étant déjà prévues par le réalisateur, et l'amenant peu à peu à sa propre damnation, et bien plus encore.
Il est sûr que les âmes sensibles et/ou puritains vont condamner le film pour sa violence allant des fois jusqu'à l'insoutenable (un viol de nouveau-né par exemple — même si ce dernier n'est pas directement cadré, mais projeté sur un écran), mais il faut bien avouer que l'on aura rarement vu aussi machiavélique depuis — le premier — Saw, et aussi bien huilé, le film suivant un engrenage dont le but reste inconnu du début jusqu'à la fin. Gardons aussi à l'esprit, que même si le sujet du film traite d'un snuff, tout cela reste de la fiction, et malgré que tout soit criant de vérité il faudra savoir garder la tête froide. D'ailleurs le réalisateur a voulu rester dans la légalité, et ne pas faire tourner les adultes et mineurs dans la même pièce, mais a ensuite tout recomposé pour en donner l'illusion. Rajoutons à cela le fait que le film possède une superbe photographie, de même que des acteurs parfaits et une bande-son excellente, tranchant avec le côté glauque du snuff, loin du trash de ce genre de production, allant même jusqu'à lui donner un côté artistique et une certaine légèreté qui rend le tout bien trop propre pour être pris au premier degré, et rappelant de ce fait le côté fictif de la chose.
Un chef-d'œuvre pasolinien, ainsi qu'une bouleversante mise en abîme sur la condition de l'être-pornostar-qui-se-fait-piéger-par-sa-propre-industrie.