A Single Man par Zéro Janvier
A Single Man marque les débuts comme réalisateur de Tom Ford, célèbre styliste pour Gucci ou Yves Saint-Laurent. Dans ce premier film, il choisit de nous parler du deuil, un thème périlleux qui peut facilement faire sombrer n'importe quelle bonne intention dans le mélo le plus pathétique.
Los Angeles, 1962. Depuis qu'il a perdu son compagnon Jim dans un accident, George Falconer, professeur d'université Britannique, se sent incapable d'envisager l'avenir. Solitaire malgré le soutien de son amie la belle Charley, elle-même confrontée à ses propres interrogations sur son futur, George ne peut imaginer qu'une série d'évènements vont l'amener à décider qu'il y a peut-être une vie après Jim.
Colin Firth est absolument remarquable dans son interprétation de George, le personnage principal du film. Il m'a littéralement coupé le souffle pendant les premières minutes du film, sublimes, où on lit sur son visage la douleur du deuil. Julianne Moore m'a moins marqué, sans doute parce que son personnage, Charley, m'a moins intéressé. Dans le rôle de Jim qui apparaît dans de nombreux flash-backs, on retrouve Matthew Goode, que j'avais découvert dans Match Point où son charme était éclipsé par celui de Jonathan Rhys-Meyers mais que j'ai redécouvert ici avec beaucoup de plaisir. Dernier personnage principal : Kenny, un étudiant interprété par Nicholas Hoult (Tony dans la série britannique Skins).
Les acteurs ne sont pas le seul point fort de ce film. L'esthétique y est également magnifique. On sent l'influence du styliste dans les couleurs, les décors, les costumes, les coiffures. Tout est fait, et bien fait, pour nous plonger dans l'atmosphère particulière de l'Amérique du début des années 60. Seul Nicholas Hoult m'a semblé un peu anachronique, peut-être parce que je le voyais trop comme l'adolescent d'aujourd'hui tout droit sorti de Skins.
L'histoire, enfin, est bien écrite. Comme je le disais, le début du film m'a coupé le souffle. Ce sont peut-être les images les plus réalistes vues dans un film pour décrire la solitude de quelqu'un qui a perdu celui ou celle qui partageait sa vie. Au-delà de l'interprétation magistrale de Colin Firth, il y a un travail minutieux sur l'image, sur de petits détails du quotidien qui ont résonné en moi et m'ont montré que la fiction n'avait jamais été aussi proche de la réalité. Le milieu du film souffre de quelques longueurs, à mon avis parce Charley et Kenny sont des personnages un peu « faiblards », mais la fin fait presque oublier la lenteur de l'heure précédente. Ce que j'ai préféré, finalement, ce sont les scènes où George est seul face à son deuil, ainsi que les flash-backs où on le retrouve avec Jim, notamment leur rencontre ou encore la soirée passée sur le canapé.
Je suis sorti du cinéma avec une impression mitigée. La lenteur de certains passages et l'impression qu'il ne se passe finalement pas grand chose au cours du film m'ont un peu laissé sur ma faim. Il me reste tout de même des images sublimes, une plongée réussie dans les années 60, un discours de George sur les minorités la peur, et une histoire d'amour enterrée mais magnifique. Il reste, enfin, cette sensation qui ne s'efface pas : celle d'avoir mis des images sur des sentiments enfouis depuis longtemps, avec un réalisme et une précision incroyables.