Réduire A Star is Born à la première apparition, en tant que rôle principal, de Lady Gaga et à une critique, toute relative, du star system serait très triste, voire extrêmement dommageable à un film qui, aux yeux du masqué, a bien d'autres atouts dans sa manche pour exister par lui-même.
Car de critique, il n'y en aura finalement que très peu, réglée en quelques répliques, deux scènes fugitives et une poignée de poncifs, à coups de "il faut avoir quelque chose à dire pour durer" et autres nécessités de rester fidèle à soi-même.
Lady Gaga, elle, celle que tout le monde voit déjà en lice pour un Oscar, sera plus envisagée du côté de son pendant Stefani Germanotta. Débarrassée de son maquillage outrancier et de ses extravagances vestimentaires, elle s'illustre dans la composition d'un personnage incandescent aux allures de girl next door, dont la beauté imparfaite suscite des frissons dans le coeur et dégage un charme fou propice au coup de foudre. Au point que l'alchimie folle avec l'allure hirsute et Eastwoodienne d'un Bradley Cooper énervant de charisme et de masculinité fonctionne de manière immédiate, en emportant tout sur son passage.
Le couple en est à ce point désarmant qu'il éclipserait presque l'ascension musicale de Stefani, délicieuse, mais souffrant de quelques errements dans la rythmique du film. Si l'on voudrait que la première partie de A Star is Born ne finisse jamais, tant sa liberté et la beauté magnétique que dégage le duo est séduisante, il ne sera pas interdit de penser que la seconde affiche quelques longueurs, alors qu'elle n'exploite jamais totalement l'ensemble des planètes thématiques composant les univers respectifs tournant autour de ces deux stars.
Restent donc au centre de cette galaxie, ces deux étoiles contraires. L'une qui nait et brille de mille feux, de manière fulgurante, l'autre qui, inexorablement, pâlit. Mais ce sont deux étoiles contraires dont l'éclat à l'unisson aveugle dans la création, dans la manière de se découvrir, de s'aimer, de s'apprendre et de partager. Ce sont deux étoiles dont les faiblesses se confrontent, dont les maux, une certaine forme de jalousie et la conscience d'un déclin parfois pathétique se bouffent mutuellement.
Mais l'émotionnel presque toujours juste, ainsi que l'amour déployé, donnent au film une beauté de presque chaque instant, une fragilité délicate et d'une humanité triste qui touche au coeur, jusque dans des ultimes minutes et une chanson
en forme d'hommage des plus vibrants à celui qui aura finalement aimé jusqu'au bout avant de décider de tirer sa révérence.
Malgré quelques petites longueurs, certaines sous-intrigues expédiées et un traitement minimisant le côté dark des démons d'un rocker en fin de vie, A Star is Born signe la naissance d'un sacré réalisateur. Car Bradley Cooper, à l'évidence, n'est pas avare de jolies images ou de plans travaillés à la symétrie diabolique. Car Bradley Cooper, à l'évidence, réussit à endiabler des séquences de concert dont on voudrait qu'elles continuent sans fin, ou à iconiser son duo vedette pour en restituer toute la cinégénie.
A Star is Born est tout cela à la fois, dans un sentiment de fraîcheur assez inédite dans une histoire déjà mise en scène à plusieurs reprises, toujours aussi intemporelle et forte, et désenchantée.
Behind_the_Mask, qui voudrait bien être Gaga de sa Lady.