Le film commence par la découverte du meurtre de la patronne du café d’un village rural. Il n’y aura pas d’enquête policière ; ce n’est pas l’objet du film qui va décrire dans une forme d’étude sociologique les habitants de ce village poitevin perdu dans les champs, et le climat social qui a conduit à cette mort. Le regard se tournera plus précisément sur une ferme isolée où végète une famille de métayers. Le propriétaire a l’intention de vendre cette ferme qui se délabre et ses 15 hectares de terre (« qu’est-ce que c’est aujourd’hui 15 ha ? un potager ! »). Homme fort du coin, il est aussi suspecté d’entretenir financièrement la bistrotière en échange de ses faveurs.
C’est la présentation d’un monde fermé, taiseux, secret, où on se livre peu, lieu de rumeurs, où le langage est rudimentaire, où on place l’argent dans de vieilles boites à biscuits métalliques, où les railleries sont souvent à connotation grivoise, où les repas à la table commune sont frugalement avalés, en silence, chacun restant dans son intériorité, où la parole bloquée laisse souvent place à de brefs accès d’humeurs, où les rares rêves d’une vie ailleurs sont vite ramenés à la réalité des travaux à faire. Le cinéaste traduit le dépérissement à l’œuvre, le manque d’espoir et le déterminisme dans lequel cette communauté est inscrite ; portrait de paysans qui se sentent inadaptés à un mode de vie qu'ils ne peuvent pourtant pas quitter.
A noter au générique, Ariane Ascaride à 26 ans dans un de ses tout premiers films, dont le rôle de "simplette" et la présence muette tout au long du film, ajoute une dimension d’étouffement à ce quotidien en huis-clos.