Cinq ans après avoir reçu l’Ours d’argent à la Berlinale pour Benni, où elle traçait le portrait d’une fillette colérique, négligée et violente, ballottée d’un foyer d’accueil à l’autre, la réalisatrice allemande Nora Fingscheidt signe avec cette épopée rédemptrice une réalisation remarquable pour approcher l'alcoolisme, le sujet des blessures psychiques et leurs transmissions intergénérationnelles
Bientôt trentenaire et après un master en biologie à Londres, Rona (Saoirse Ronan) s’est perdue dans la vie nocturne londonienne et l’alcool. Une addiction qui lui a depuis beaucoup coûté et qu’elle entend aujourd'hui dompter. Au bout de dix ans de fêtes tristes et d'excès elle est épuisée
Alors après cette décennie d’absence, la voilà de retour dans la ferme de ses parents, partie se resourcer sur les îles Orcades, archipel au nord extrême de l’Ecosse dont la légende raconte qu’il serait la partie émergée de la queue d’un dragon.
Paysages austères, sauvages, battus par les vents, les tempêtes et le fracas des vagues, elle redécouvre le paysage unique et rude dans lequel elle a grandi, ses souvenirs d'enfance se mêlent à ceux de sa période plus récente de toxicomane
Dans un montage kaléidoscopique complexe et palpitant, le récit mêle aux fracas de la nature déchainée, les flashbacks poignants pour décrire l’enfance traumatisée par un père bipolaire, une mère dont la foi en Dieu a provoqué la séparation d’avec son mari, la spirale descendante de sa toxicomanie alcoolique à Londres, son séjour dans un programme de réadaptation strict et le décompte des jours d’abstinence.
The Outrun emporte le spectateur dans le tourbillon de la mémoire de la tourmentée Rona. Deux atouts majeurs dans cette réussite. Saoirse Ronan est éblouissante et les paysages des Orcades sont magnifiques et superbement filmés.
Saoirse Ronan impressionne dans un rôle exigeant qui la voit passer des soirées londoniennes alcoolisées, à la solitude du bout du monde, aux séquences d’agnelage dans la ferme de son père ou aux bains de mer des plages nord atlantique. Les paysages écossais, d’une beauté austère, isolée mais sublime jouent un rôle essentiel dans l’atmosphère du film, offrant un cadre parfait pour la reconstruction personnelle de l’héroïne.