Septième long-métrage d'Albert Dupontel, Adieu les cons se présente comme un drame burlesque et poétique, drôle mais aussi critique. S'il y a bien une chose que j'apprécie et qui définit sa filmographie, c'est bien son ton particulièrement cynique et corrosif, toujours mélangé avec une touche d'absurde qui rappelle l'univers visuel de la bande-dessinée. Alors, ce n'est pas mon film préféré du réalisateur, mais j'avoue qu'en ces temps difficiles, Adieu les cons arrive à point nommé en illustrant cette envie profonde de tout plaquer pour se libérer soi-même, loin du cadre conforme imposé par la société et ses dirigeants. Le récit nous embarque alors dans une échappée à la Bonnie et Clyde, un road-trip identitaire mouvementé et émotionnellement investi. C'est un conte moderne juste, touchant et imprévisible. L'écriture des dialogues est fine et articule avec légèreté une pantomime décalée composée d'éclopés de l'existence : un informaticien suicidaire, une coiffeuse mourante et un aveugle mis au placard. Adieu les cons se savoure à toute allure, avec panache et dérision. Il y a de très belles scènes où la caméra s'emporte dans des mouvements acrobatiques improbables et poussent les traits de la fantaisie. J'ai pensé à Jeunet avec ses couleurs sépia et sa manière d'aborder l'histoire comme un train en marche qu'on essaye de rattraper. C'est inventif tout en restant concis. J'ai aussi beaucoup aimé la subtilité avec laquelle il pose un regard critique sur le monde d'aujourd'hui : des figurants constamment figés sur leur portable ou derrière un écran, ne vivant plus l'émotion d'un regard ou d'une rencontre. C'est un détail qui en dit énormément sur le raz-le-bol des personnages et les aberrations de notre présent, je trouve, et ce, avec un humour noir qui le caractérise ! Cette satire sans prétentions est emmenée par un trio étonnant. Virginie Efira est superbe, comme à son habitude, et prouve une nouvelle fois qu'elle peut tout jouer. Le César est à portée de main, si bien qu'elle fait de l'ombre à Dupontel qui se fait oublier dans ce personnage touchant et clownesque malgré lui. Nicolas Marié, lui, apporte une naïveté et un décalage intéressant et comique. Néanmoins, Adieu les cons ne m'a pas plus ému ni marqué que ça. Une certaine pudeur régule les émotions qui s'immiscent à certains moments. C'est touchant et joli sur le moment mais personnellement je m'en souviendrais pas longtemps. La gestion des flash-backs m'a également moins convaincu. On y décèle une vraie signature, un vrai besoin de raconter mais de là à dire que c'est un chef-d'oeuvre... Pas pour moi en tout cas. Je pense que le contexte actuel joue énormément sur la réception ultra-positive de ce film, et c'est tant mieux pour lui j'ai envie de dire !