Avec 7 Césars, ça doit forcément être un bon film non ? Du haut de ma grande inexpérience, j'ai cru pouvoir faire aveuglement confiance au jury de la Grande cérémonie, dernier rempart de la Culture™ face à l'injustice du monde moderne et aux politiciens cyniques. En fin de compte, je crois que les Césars sont simplement une séance publique et institutionnalisée de circlejerking en règle pour boomers en panne d'idées, déclinants, mais arrivés au faît de leur gloire et comptant bien profiter encore un peu de leurs derniers petit-fours-champagne et honneurs.
Alors c'est vrai, peut-être que je n'adhère simplement pas au "style Dupontel". Pourtant, j'avais bien apprécié Au revoir là-haut. J'en garde un souvenir plutôt ému, de roman sincère et poétique, de beauté tragique. Là, c'était différent. La scène d'exposition, encore, pourquoi pas. Un humour tragique, un peu absurde, ça ne commençait pas mal. Mais au-delà, le film ne crée rien. Le personnage principal , Dupontel en personne, incarne un informaticien malheureux, suicidaire, viré de son poste au ministère par des plus jeunes que lui sortis des grandes écoles d'ingénieurs. Pourtant, c'est un informaticien de génie, capable de virtuellement "tout faire" en trois tapotements sur son clavier d'ordinateur. Deux choses: Dupontel - le réalisateur - n'a rien compris à la vie, et Dupontel n'a rien compris à l'informatique. En fait, rien n'est crédible, tout est surfait. Que le style de Dupontel soit volontairement extravagant, touche au "fantastique", je veux bien; mais ici les coïcindences extraordinaires et les licences prises avec le lourd carcan de la réalité deviennent des facilités scénaristiques, qui ôtent tout identification possible avec l'histoire. Dupontel à l'air d'un gamin en extase devant les "miracles de l'informatique" , un techno-béat, ou plus simplement un boomer qui n'y comprends fondamentalement rien mais qui s'imagine qu'il suffit d'un ordinateur pour récupérer tous les papiers d'une personne ou modifier en temps réel le fonctionnement des ascenseurs d'une tour entière de la Défense... Encore une fois, des facilités scénaristiques, qui n'apportent absolument rien au film mais permettent peut-être d'assouvir quelques fantasmes de boomers, bercés de mauvaise vulgarisation. Au-delà de ça, car après tout, "pourquoi pas" me dira-t-on, le film est rempli de clichés, grossier (en fait, à l'image du fantasme très grossier de la technologie toute-puissante). La scène finale, et l'histoire afférente du jeune informaticien amoureux transi et atrocement timide, est surtout très cringe (certains commentateurs faisaient à juste titre remarquer la dimension assez malsaine de la situation). Plutôt que de libérer ses personnages d'une destinée tragique, ou de circonstances malheureuses, par une introspection subtile, un processus d'apprentissage et de lutte, contre soi-même ou contre des institutions aliénantes, Dupontel semble au contraire les enfermer dans un rôle caricatural, faisant croire que "tout est possible", que la réalité s'adapte aux individus tels qu'ils sont, et que chacun, finalement, aura droit à la reconnaissance de sa vraie valeur, de son "génie" sans fournir d'effort. En fin de compte, un film avec beaucoup d'explosions, beaucoup de beaux effets spéciaux, mais d'une absolue vacuité.
J'ai tendance à croire qu'un bon film doit pouvoir nous dire quelque chose de fondamental sur les rapports humains, sur la vie, sur la mort. Il doit pouvoir s'élever au rang de mythe, nous parler à un niveau élémentaire. Ce n'est pas une question de réalisme au sens absolu : le fantastique, la science-fiction, le film muet peuvent y réussir. C'est une question d'authenticité, de sincérité, d'universalité du genre humain. Là, je n'ai vu aucun être humain à l'écran.