After Porn Ends
5.1
After Porn Ends

Documentaire de Bryce Wagoner (2012)

Mal filmé et mal monté, comme un mauvais porno

Pour je ne sais quelle raison, à un moment donné, il y environ un an, je m'étais demandé ce que devenaient les stars du porno quand elles raccrochaient. J'avais trouvé sur internet un article d'une femme qui s'en était sorti, et j'avais découvert ce documentaire, After porn ends. Un documentaire entier qui traitait de la question que je me posais, magnifique !


Déjà, le film adopte une démarche qui m'a plu : ne pas ouvrir en abordent le sujet du porno, ce qui aurait été la chose évidente à faire. On nous présente juste des gens ordinaires, avec des métiers très variés, il y a une femme chasseuse de primes, un peintre, une agente immobilière, ... Ils sont tous d'anciens acteurs porno, mais ça passe au second plan.
En revanche, je ne sais pas si c'est avec l'âge ou quoi, mais pour certaines, leur ancien métier se voit sur leur visage refait, particulièrement moche.
C'est le cas de "Houston", une actrice fort populaire en son temps, qui raconte avoir subi une "labiaplastie", une opération pour réduire la taille de ses lèvres. Dont elle a ensuite vendu les bouts qu'on a retiré. Putain, c'est immonde.
Juste après ça, on nous montre des "historiens" du porno, et un professeur d'université qui a fait du porno un de ses sujets de prédilection. Qui se contentent de se présenter, avant qu'on ne passe à une actrice qui parle vite fait de sa carrière et, sans aucune transition, parle d'un stalker qu'elle a eu.
Puis des personnes parlent de la façon dont les acteurs pornos sont perçus. J'ai cru qu'on allait continuer sur cette voie, mais non, on passe à un autre intervenant qui raconte son histoire.
Je ne comprends pas ce qui a poussé le réalisateur à répartir ainsi chaque portion du film, ça manque sacrément d'organisation.
La seule structure, c'est ça : un intervenant raconte son histoire, puis les "historiens" donnent leur point de vue sur la vision négative que la société a du porno, et on recommence. On dirait que le propos sur le porno, du coup, est fractionné tout au long du film, on ne nous en fait part que petit bout par petit bout.
Au niveau du montage, il y a un truc très étrange qu’on retrouve tout au long du film : un des intervenants finit de parler, et à l’image on reste sur le même plan, alors qu’on son on entend ce qui est dit dans le plan suivant. Sans changer d’intervenant. Pendant un instant, on entend donc la personne continuer à parler… alors que ses lèvres ont arrêté de bouger. C’est un effet des plus curieux, que je n’avais jamais vu ailleurs. Personne n’a trouvé ça bizarre en voyant le film avant qu’il ne sorte ?
Autre détail qui m’a agacé, c’est, pendant les interviews, l’introduction de plans de coupe… sur le visage de l’intervenant qu’on voit la bouche close. Et ce ne sont même pas de bons plans, en général c’est des plans avec un zoom raté, ou un mouvement de caméra qui semble chercher à arranger le cadre… on dirait des images prises avant l’interview, quand le cameraman cherche son cadre ! C’est n’importe quoi.
Et toutes les interviews ont été filmées avec une seule caméra, ce qui ne serait pas si grave si le cameraman ne zoomait pas ou ne cherchait pas à bouger son cadre maladroitement en plein milieu d’une phrase. Ca empêche, au montage, de faire passer ce changement de cadre par une coupe. Mais ils auraient au moins pu mettre une illustration ou un plan de coupe par-dessus à ce moment-là…


Bon, si la forme laisse vraiment à désirer, on a droit, de la part des anciennes porn-stars, à quelques histoires intéressantes, surtout concernant ce qui les a amenés à faire du X.
Asia Carrera était une fille nerdy, et elle en avait marre d’être l’intello, elle voulait qu’on la trouve sexy. Semblant malgré tout curieuse et dotée d’une constante envie d’apprendre, sur le plateau elle a cherché à connaître un peu tous les métiers…
Seka, ayant commencé dans les 70’s, dit qu’elle trouvait les actrices de l’époque négligées, elles ne donnaient pas une bonne image de la femme, et… voilà, ç a lui a donné envie de faire ce métier.
Richard Pacheco, lui, a dû choisir entre suivre un séminaire pour devenir rabbin et avoir un rôle dans un porno. Il a fait son choix quand il a su que pour son séminaire, il devrait passer deux ans en Israël pour apprendre l’Araméen.
Ironiquement par rapport à sa carrière, quand il était gamin, on se moquait de lui parce qu’il était gros…
Tiffany Million quant à elle, a choisi le porno car c’était bien payé pour peu d’heures de travail, et ça lui permettait du coup de passer du temps avec sa fille.
Dans l’ensemble, le réalisateur a eu la chance de tomber sur des intervenants aux profils intéressants. On évite le cliché de la bimbo conne… sauf avec Mary Carey, que le film cherche à ridiculiser un peu. Elle a cherché à devenir gouverneur en mettant en avant ses atouts mammaires ; il y a un plan où on la voit demander un mot à quelqu’un (ce mot étant "unprecedented") ; et elle raconte qui si elle devient vraiment fauchée une fois la trentaine passée, elle accepterait de coucher avec un noir.


Le film ressemble donc plus à une série d’histoires sur différentes carrières dans le porno ; c’est sympa, mais c’est pas le sujet qu’il était censé traiter.
After porn ends est en plus de ça vraiment paresseux, ça aurait été beaucoup plus intéressant de croiser les propos des différents acteurs et actrices, au lieu d’accumuler en un seul bloc tout ce que telle ou telle personne a à dire, tous sujets confondus.
Ce que je regrette aussi, c’est que tous semblent dire, à des degrés différents, que le porno c’est mal. Même les historiens du porno, et l’ancienne actrice qui continue à avoir des rôles non-sexuels dans des films X.
Je ne dis pas que le porno est bien ou mal, mais ça aurait été intéressant qu’une personne avance des arguments pour défendre l’industrie, ça aurait apporté un autre point de vue au film. On a uniquement une ébauche de cela, quand cette ancienne actrice dit que quand des personnes entrent dans cette industrie sans le vouloir, il faut de suite en sortir. Ca sous-entend qu’il y a d’autres personnes qui sont à l’aise dans ce domaine ; c’est ces personnes là que j’aurais voulu entendre aussi. (je repense à un reportage récent sur la prostitution, où on avait des personnes qui disaient honnêtement aimer leur métier… tout en critiquant certains aspects).


Au bout de 40mn, j’ai commencé à sentir de l’ennui. Peut-être qu’une structure accrochant plus l’attention du spectateur aurait résolu le problème, je ne sais pas.
Lors du générique de fin, on a ce grand classique du texte évoquant ce qu’il est advenu de chacun. Pour Raylene, juste après qu’on l’ait vue dire que son mari et son fils ont changé sa vie… on apprend qu’elle a dû retourner dans l’industrie du porno à cause de problèmes financiers. C’est déprimant.


After porn ends n’est pas un bon documentaire. C’est mal filmé et mal monté. Mais comme toujours avec les docus, il suffit de quelques bons intervenants, qui racontent des choses intéressantes, pour sauver un peu la mise.

Fry3000
5
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le 16 mars 2015

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Wykydtron IV

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