Il y en avait de jolies choses dans le nouveau film de Malgoska Szumowska pour en faire un beau film tout simplement, prenant et émouvant… De jolies choses pour un résultat qui laisse en partie déçu, indifférent aussi : une mise en scène soignée, élégante, une atmosphère douce et chaude baignée de soleil et d’un homoérotisme latent, deux interprètes sobres et justes (Andrzej Chyra et Mateusz Kosciukiewciz), une musique inspirée, et un propos fort, actuel, engagé quand on sait l’homophobie à l’œuvre dans une Pologne basse du front et à tendance ultra catholique. Mais ça ne prend pas. Ça ne prend jamais d’ailleurs.

Peut-être parce que le scénario, balisé et assez prévisible (voire à peine crédible : il y a quand même quatre gays qui se tournent autour dans ce coin de campagne complètement paumée), s’égare souvent dans des suppléments narratifs inintéressants ou inutiles (la femme de Michal qui séduit Adam et qui s’appelle Ewa, évidemment, le jeune garçon qui disparaît, l’autre qui incarne la luxure et la tentation…), et en oublie de se concentrer sur son véritable sujet. Peut-être parce que le film accumule trop de fins possibles (au moins une dizaine) jusqu’à imploser en vol et ne pas rendre la dernière un minimum recevable. Peut-être parce que le rythme souffre d’un antagonisme certain entre scènes gâchées (Adam éméché dans son salon, la procession religieuse sur fond de rock FM…) et séquences magnifiques (le cache-cache dans le champ de maïs, Lukasz contemplant l’épicerie en flammes, l’étreinte silencieuse…). Parce que, parce que…

Aime et fais ce que tu veux n’est pas l’histoire d’un prêtre catholique homosexuel, refoulé et tourmenté, qui tombe amoureux d’un jeune bouseux peu bavard aux allures forcément christiques. C’est l’histoire d’un homme en lutte avec ses sentiments et ses pulsions profondes, étouffées, ravalées, et ivre d’un besoin d’amour absolu. Un homme qui se croit "malade", s’imagine condamné parce que "différent". Et qui doit s’accepter au regard des autres et de sa foi. Louables intentions bien sûr de vouloir susciter le débat, de vouloir questionner, chambouler les préjugés et les tabous d’une société moralement étriquée, mais le film n’évite que rarement le gentil plaidoyer (et les symboliques appuyées) en manque d’intensité et de franche transgression.
mymp
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le 11 janv. 2014

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