Peu de moyennes sur Senscritiques m'ont autant surpris que celle d'Alexandre. Je l'avais déjà vu 2 ou 3 fois avant de découvrir son drame statistique, tandis que pour un film de presque trois heures j'en étais à chaque fois ressorti relativement conquis (hihi). Alors pourquoi tant de haine envers l'un des trop rares péplums de ce triste millénaire ?
Evidemment, la première piste me venant à l'esprit avant de lire certaines des critiques négatives fut le piste Colin Farrell. Clairement, le gars a plutôt l'air ridicule avec sa perruque peroxydée et Oliver Stone nous le fait passer pour une chochotte toujours en train de se plaindre. Mais c'est justement ce deuxième point qui m'intrigue. Non pas que ça me plaise que l'un des plus grands conquérants de l'histoire soit gay ou bisexuel. Rien à voir. Ce qui m'intrigue c'est, comme le titre du film l'indique, que l'on parle ici de l'homme plutôt que du conquérant. Ce jeune éphèbe n'étant pas un dieu ni même un demi-dieu, non, un homme. Et j'apprécie le risque d'une telle approche "démythificatrice", même si évidemment on perd un peu sur les plans épique et charismatique. En surnaturel aussi. Mais j'en conviens, le choix Colin Farrell n'était probablement pas le meilleur - quoiqu'on finit rapidement par s'y habituer à sa tête de lion dépressive autour de laquelle tournent les venimeux serpents de la trahison.
A noter également la ressemblance extraordinaire du jeune acteur l'incarnant au début du film. C'est son fils IRL ou quoi ? Bluffant.
Le reste de la distribution alors ? Pas pour ma part. Jared Leto en jupette pourrait même faire changer de bords les bonshommes les plus sûrs d'eux ; Val Kilmer s'avère convaincant en roi borgne alcoolo ; l'acteur jouant Darius III (Raz Degan) déborde de charisme ; quant à Rosario Dawson en Roxane : Rrrrrr ! Après, j'ai lu beaucoup de mal au sujet d'Angelina Jolie, qui évidemment n'a rien d'une grande actrice, mais franchement, je trouve qu'ici elle s'en tire plutôt très bien, notamment lors de l'épisode du régicide (qui paraît-il n'a rien d'historique). Régicide sous forme de flash-back bien placé, mettant en avant un montage souvent très efficace.
L'aspect historique donc ? Ben apparemment non (je ne suis pas spécialiste hein) - Oliver Stone, même s'il n'a pas trop le temps de rendre compte de tous les exploits d'Alexandre - semble faire beaucoup plus fidèle que les autres productions récentes, malgré, je le répète, quelques fantasmes (au sujet d'Olympias notamment) visant à servir la psychologie de son héros - et donc pour le coup pas forcément très honnêtes, mais pour un rendu assez passionnant je dois avouer. Ce n'est donc pas là non plus que l'on peut crier au scandale me semble-t-il...
Les batailles alors ? C'est clair qu'on a connu mieux dans l'ensemble. Plus réaliste en tout cas. N'empêche que celle de Gaugamèle, hypnotique et passionnante, et aux vues aériennes couvertes de poussière, fonctionne parfaitement. Tandis que, dans un tout autre genre, le face-à-face entre Alexandre montant Bucéphale et un éléphant monté par un indien lambda me scotche à chaque fois ! Son épilogue à l'esthétique carminée nous rendant compte une fois de plus que l'objectif du réalisateur reste avant tout de nous mettre à la place du roi macédonien - quoiqu'il se serve par ailleurs d'un narrateur (Ptolémée) l'idéalisant en voix-off.
Niveau décors, pas de quoi se plaindre non plus. L'entrée dans Babylone, par exemple, est juste somptueuse, et avec la musique qui va bien. Vangelis pour ceux qui n'auraient pas reconnu. Ceci dit, c'est vrai qu'on aurait pu et aimé voir un peu plus de choses.
Aussi, je vous l'accorde, le dénouement m'apparaît toujours aussi bâclé. A la va vite, on se dit que quand même, plutôt que de proposer un film de 3 heures, il aurait mieux valu tenter une petite trilogie, ou au moins deux longs-métrages. Mais pas sûr que les investisseurs eussent (ont?) été de cet avis...
Alors au final, si je lui mets ce joli 7/10, c'est que je ne m'ennuie jamais devant ce film (un peu à la fin quand même) un peu kitsch et parfois too much, mais aussi d'une grande sincérité. De gros défauts il y en a quelques-uns, mais de belles qualités encore plus ; et j'aime son parti pris non-manichéen. Son point de vue grec-friendly ^^ jusqu'au-boutiste également. Celui qui ne montre pas le héros fantasmé que l'on voudrait voir, mais plutôt celui - imparfait - qu'il devait être : un rêveur de soleil oriental ; un humaniste affranchisseur des peuples vaincus assumant mal son statut divin (qui finira par le rendre fou) ; en somme "un idéaliste épuisant le commun des mortels". Sans oublier le grand stratège - même si cet aspect ne sera mis en avant qu'à Gaugamèle.
Une épopée guère subtile, mais diablement divertissante, pour laquelle j'ai beaucoup de tendresse.^^