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Il est assez amusant qu’une œuvre à ce point matricielle pour le cinéma d’épouvante et de genre, enfantant une excellente saga et de dignes rejetons – pensons à Life (Daniel Espinosa, 2017) – témoigne d’un tel attachement à la mère. Ridley Scott et son scénariste Dan O’Bannon abordent l’invasion d’un vaisseau par un prédateur comme une vaste métaphore filée de la maternité, mais une maternité qui a l’originalité d’accoucher non pas d’un humain mais d’un « parfait spécimen ».


En effet, la gestation n’a ici pas lieu dans l’utérus du parent mais dans celui de l’hôte que l’on féconde et que l’on tue lorsque l’enfant est expulsé par le thorax. C’est ce qui fait de l’alien un corps pur, sans trace ni cicatrice liées à la naissance et qui établiraient une quelconque dépendance synonyme de fragilité. Il tire sa naissance de la destruction, symbolisée à l’écran par l’explosion du Nostromo, vaisseau-mère justement baptisé « mother », dont les couloirs, les galeries et les sas cartographient l’intérieur du corps porteur. Il est donc à la fois création et créateur, raison pour laquelle Ash se passionne pour lui et mute en adversaire défenseur de la connaissance. Les instruments technologiques, utilisés pour augmenter le suspense et rendre crédible l’univers de science-fiction, sondent, radiographient, codent la présence supraterrestre que l’on ressent davantage qu’on ne la voit à l’écran, les apparitions du monstre se limitant à quelques petites minutes. Preuve de la maestria de mise en scène du cinéaste, de son équipe technique et du compositeur Jerry Goldsmith.


Le long métrage porte déjà les germes de Prometheus (2012) et d’Alien: Covenant (2017) qui expliciteront l’origine et la fonction de ces êtres supérieurs et des « ingénieurs », du latin ingenium signifiant à la fois le « génie » et la « naissance » (de gignere, « naître »). Ridley Scott pose ainsi les bases d’une mythologie à part entière qu’il explorera dans les décennies suivantes, soucieux d’écrire sa propre Bible en la vidant de ses valeurs chimériques, en la dépouillant de son humanité et de sa mièvrerie, toujours plus près du Néant. Un indémodable chef-d’œuvre.

Fêtons_le_cinéma
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le 21 avr. 2021

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