Un temps destinée aux mains de Neill Blomkamp, avant de retourner chez le géniteur Scott pour le meilleur (Prometheus) comme pour le pire (Covenant), la revitalisation de la saga Alien, monument dans l’horreur et la SF, aura finalement été confiée à Fede Alvarez. Un choix logique au vu de la filmographie du bonhomme, versée dans une horreur qui tend à finir en bouquets finaux jubilatoires, et de sa réussite dans la reprise de la franchise Evil Dead.
La prise de risque est assez minimale, l’uruguayen s’accrochant au film originel pour dérouler le sien. Un retour aux sources esthétique et situationnel, qui n’omet pas d’intégrer des éléments de lore des suites et préquels pour préserver la cohérence de l’univers. On retrouve donc un vaisseau aux couloirs claustrophobiques, du rétro-futurisme en pagaille dans les designs, et quelques citations directes (et dispensables) de lignes des précédents opus. Et, plus gros bémol, on retrouve également un Ian Holm en CGI qui tâche autant la rétine qu’il questionne l’éthique de ramener un mort pour faire tourner la planche à billet. Sans doute le gros point noir du film, mais qui relève plus du débat extra-diégétique que de la qualité intrinsèque de l’ensemble
Mais Fede n’étant pas un manche, il ne se contente pas d’une copie alla J.J. Abrams sur The Force Awakens. Il insuffle Romulus d’un paquet d’idées qui donne une identité propre au métrage, refusant la surenchère (final à part) pour mieux développer le préexistant. Enfin on voit la vie coloniale sous le joug de la Weyland-Yutani (même si ce début fait miroiter un scénario qui aurait sans doute été plus original), enfin les facehuggers sont suffisamment mis en avant, enfin les particularités biologiques de l’alien déjà présentées sont utilisées à leur plein potentiel. Et si les scènes obligatoires et donc attendues arrivent, comme la naissance d’un xénomorphe, la construction de la tension jusqu'à ce point rend le payoff efficace. Ajoutez à cela un jeu avec l’apesanteur comme idée novatrice, et vous obtenez une œuvre qui dépasse le statut de simple variation, quand bien même les thématiques qui parcourent le spectacle empruntent un peu partout dans la saga (transhumanisme, survivalisme, exploitation du prolétariat…). Quant au final, jouant sur la frontière du grand guignolesque, il délivre un spectacle assez réjouissant et coutumier des habitudes du cinéaste.
Je suis allé voir le film sur la défensive, et j’en suis ressorti enthousiaste. Si on peut regretter des personnages rapidement brossés et sans l’envergure des gueules de la tétralogie initiale (quand bien même Cailee Spaeny, après Civil War, confirme qu’elle en a sous le coude), ainsi qu’une propension à trop vouloir singer ses aînés, Romulus n’en reste pas moins une très bonne surprise : respectueux de son lourd héritage, haletant, perclus de bonnes idées, et laissant place à un nouvel espoir pour le futur de la franchise.