L'air marin avec Robert Blueford.

Le titre du film ne ment pas. Loin, très loin de - la Croisière s'amuse -, sur le Virginia Jean, c'est juste la grosse mémerde...
Le navigateur se réveille. Son bâteau prend l'eau, mais il reste stoïque bien que l'on pourrait s'attendre à voir son visage virer au rouge vif et lâcher un :"Putain de bordel à queue de container de merde ?!! !!!!!".
Mais non...
Le matelot navigue sur les flots depuis déjà très longtemps. Visage buriné, corps éprouvé, son expérience lui indique qu'en toute circonstance il doit rester maître de lui-même.
L'océan est rude, très rude même, si dur que les gouttes de pluie sur la peau sont une bénédiction.

Le scenar met à l'épreuve l'acteur qui aurait déguster même avec 20 ans de moins. On en voudra pas au réalisateur de planquer des mecs hors champs pour faire remonter Robert sur l'embarcation lorsqu'il le script lui fait boire la tasse.
Il n'y a pas de dialogues, ou très peu. Le film est un huis clos qui parle avant tout de ce qu'est un navigateur.
Solitaire, réservé et réfléchi, surtout débrouillard, l'homme doit redoubler de courage, faire preuve de sang froid et de patience.
La navigation est une passion viscérale, un amour simple et plus fort que tout envers un océan fragile et transversalement impardonnable dès la première erreur. Un amour complexe et démesuré qui pousse le forcené à l'exil, à l'isolement pour contenter cette pulsion incontrôlable qui l'attire vers le large.

Le film est un savant mélange d'émotions paradoxales.
Paradoxales pour deux raisons. La première, idéologique, car le confinement dans le bâteau où la camera lèche le personnage vient s'opposer à l'étendue de l'océan.
La deuxième, davantage technique, parce que le film souffre d'un manque évident de plans larges ouverts sur l'immensité, pardonné, car il n'y a finalement trop rien à montrer d'un paysage invariable si ce n'est les hauteurs des vagues.
La caméra préfère centrer le cadre sur le personnage, montrer son génie marin, montrer la lutte contre les éléments malgré son âge...montrer l'épreuve ultime, formatrice et salvatrice quelque part recherchée par tout grand navigateur.

Il souffre d'un manque de plan-séquences, de quelques erreurs de montage et parfois même de raccordements hasardeux.
Certains bouts de séquences sont inutiles, (SPOIL) comme les quelques secondes de bobines à filmer les petits poissons sous le canot de sauvetage...mais c'est bien de quelques secondes de ci de là dont il est question...

On pourra sourire ou noter seulement l'exemplarité de cet homme qui met 1H à tout juste fredonner un timide : "merde, fait chier" et un prodigieux "PUTAIN" 10 mins plus tard, au lieux d'exploser de colère et de désespoir.

Un film avec un seul acteur. On s'imagine cependant les artifices pléthoriques et les installations hors cadre nécessaires à la réalisation d'un tel film.
Un film réussi, profond, homérique, empreint d'une merveilleuse mélancolie, que l'on aura même plaisir à revoir.


http://www.senscritique.com/film/En_solitaire/critique/33312835
FPBdL
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le 29 avr. 2014

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FPBdL

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