Ode à l'évasion de ses propres prisons

Hannes, un chauffeur-livreur semi-autiste, vit en solitaire à Dortmund. Sa grande passion est le chemin de fer et l'étude des horaires et itinéraires des trains. Il souhaite participer au premier "championnat international des experts des horaires de train" à Inari, au nord de la Finlande. Quand son patron lui annonce qu'il refuse son congé, il l'assomme. Hannes part à l'improviste vers le Nord. Entre-temps, son patron est retrouvé mort dans son bureau, le coffre-fort est vide. La police soupçonne Hannes d'avoir assassiné son patron. Franck (Peter Lohmeyer, excellent) le commissaire de la police criminelle de Dortmund s'envole vers la Scandinavie pour le retrouver.
Cependant Hannes parvient, volontairement ou pas, à échapper à ses poursuivants. Sur le ferry qui traverse la Baltique vers Turku, dans le calme et la beauté de la nuit nordique, il fait la connaissance de Sirpa, une belle Finlandaise déçue par sa relation actuelle, et tombe amoureux d'elle.
Franck le commissaire finit par retrouver Hannes à Inari. La camionneur convainc le policier de le laisser participer à la compétition. Il atteint la finale en choisissant toujours l'itinéraire de train le plus court pour traverser l'Europe d'un point à un autre car il a mémorisé tous les horaires, toutes les gares et toutes les correspondances! Mais sur la dernière question, il mentionne la route que Sirpa lui a décrite comme magnifique, même si elle est plus longue ("La plus belle route pour aller à Inari passe par le nord de la Suède, par Haparanda"). Sa rivale l'emporte.

Un des plus beaux films du cinéma allemand, avec tout l'humour sec de Joachim Krol (mon comédien allemand préféré), une ode à l'évasion de ses propres prisons et un voyage vers le Nord avec une présence de nature mi-spectaculaire, mi-atmosphérique. On s'y sent très bien tout au long, aucun temps mort, aucune longueur malgré la lenteur et le peu de paroles. Même si la trame criminelle ne se prend jamais très au sérieux et qu'on n'y croit pas trop, il n'y a pas d’invraisemblances à part les performances d'intelligence hors norme d'un chauffeur-livreur.
J'aime quand les petites gens sont filmés juste, dans leur vraie vie, et quand ils s'en sortent, de leurs prisons de travail et de vies sociales en dessous du minimum vital, de famille inexistante, d'amitiés qui n'en sont pas, de hiérarchies anonymes ou d'horizons gris et bornés.
Quand il arrive enfin en Laponie, la nature immense et une relation vraie sont les symboles de sa nouvelle liberté.
Il peut donc sans se mettre en danger perdre le concours qui aurait été la reconnaissance publique (et la récompense d'argent) de toute une vie de travail. Car à ce moment là, il se sait supérieur, et choisit une nouvelle voie.
À part ça, ce film montre les mentalités et le calme des gens des pays nordiques, mais sans la dépression ni la prise de tête avec qui on les associe trop souvent.

Dommage qu'il y ait tant de moustiques là-bas.
Dommage aussi que ce film ne soit pas sorti en France (enfin je crois).