Satire ratée
Il y a parfois une sorte de défaut d'alignement entre l'orientation d'un film et la réception que l'on peut en avoir qui peut gâcher tout ou presque. "Alouettes, le fil à la patte" semble être un...
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le 15 août 2018
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Kladno, Fin des années quarante. Une troupe d'accusés "bourgeois" est assignée pour rééducation au triage du métal pour refonte, avec, bien entendu, des objectifs inatteignables. Il y a un ancien libraire philosophe ; un procureur trop indulgent ; un entrepreneur fabricant de baignoires ; un ancien barbier inutile ; un saxophoniste (instrument "bourgeois") ; un laitier ; un jeune cuisinier juif qui s'obstine à respecter le shabbat. Ils opèrent non loin d'une troupe de prisonnières, gardées par un homme de sécurité plutôt touchant qu'ils font tourner en bourrique.
De cette situation de départ, le film tire une série de saynettes : le mariage du gardien, qui épouse une jeune femme attardée mentale malicieuse qui aime se cacher dans des endroits improbables de leur appartement ; la romance entre Jitka, une jolie brune prisonnière, et le cuisinier, jusqu'à leur mariage (opéré séparément par procuration vu que Jitka est détenue) ; la disparition du laitier ; les conversations philosophiques du bibliothécaire et du procureur ; les coups en douce pour reluquer les prisonnières, tout à fait conscientes et consentantes ; le louche commissaire politique, qui semble un peu trop attaché à l'hygiène des petits miséreux ; la visite d'une huile du parti ; la visite de pionniers avec une institutrice qui désigne les condamnés comme des démons. La dernière scène voit nos héros, peu productifs, envoyés dans une mine, sans perdre leur humanité.
Ce n'est pas un film très pro-stalinien, au cas où vous ne l'auriez pas compris, et c'est ce qui explique qu'il ait fallu attendre la chute du mur pour qu'il puisse être vu au cinéma. Film fauché, qui s'ouvre sur un panoramique sur des industries métallurgiques qui donne une impression de dévastation. Impression juste, vu la pollution que connut la Tchécoslovaquie jusque dans les années 1990. Pas d'allusion directe aux Russes, mais des mots d'ordre du parti très staliniens visibles à plusieurs reprises sur des calicots, alors que les protagonistes font ce qu'ils peuvent pour tirer au flan. Pour garder leur humanité, aussi. Ils ne se privent pas de traiter les envoyés du Parti de faux travailleurs. Un film assez sensuel également, avec une tension sexuelle assez diffuse autour de ces femmes aux visages si expressifs et souriants, comme une bravade face au régime policier (au fond peu montré). Le rythme du film est nonchalant mais pas paresseux, au contraire il y a beaucoup de contenu et un faux air d'improvisation qui rappelle Les petites marguerites (auxquelles je préfère ce film, moins de nourriture gaspillée). Au fond, il y a une ambiance un peu loufoque et fantaisiste qui m'évoque un autre film qui se passe dans une décharge : Dodes'kaden. Le gag du camion qui peint une façade et laisse en pochoir la trace de deux mecs qui discutaient me fait vraiment rire.
Bien sûr, ce ton assez rêveur sur lequel on dénonce le régime me fait penser à la manière dont les Russes rêvaient sous Gorbatchev à la chute du régime communiste sans vraiment imaginer ce que serait le capitalisme (les pauvres). Tout cela respire une forme de candeur qui a quelque chose de profondément touchant.
Un film qui dénonce le stalinisme sur un ton léger et fantaisiste. Assez unique, non ?
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Créée
le 14 mars 2016
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