Grosse surprise et belle claque pour ce drame policier portant sur la traite mexicaine.
Tradition du modeste auteur oblige, autant pitcher le sujet en quelques mots et parler surtout direction artistique et casting pour ne pas déflorer l'histoire (warning en passant : ne pas visionner le trailer-spoiler sur youtube).
Après un début faussement téléfilm CBS, les 2 Simon merveilleusement à contre-emploi (même si le héros du "Prince des ténèbres" se fait voler la vedette par le magnétique salopard Gerald McRaney) et le récit aux saisissantes fulgurances haussent vite le ton.
Dur, édifiant, amer : le titre français (du* Jackals* original) est soit trompeur, soit tragiquement ironique.
Arrivant après Missouri breaks mais bien avant *3 enterrements *ou le sublime Lonestar, American justice* n'a pas la prétention de révolutionner l'opinion mais la simple et ferme intention de l'informer sur l'inhumanité véreuse faisant tranquillement son business avec le Mexique... sur ses terres bien ricaines.
Prolifique réalisateur de séries 80s/90s (dont *Simon & Simon & Magnum rappelant ici logiquement les meilleurs épisodes c.a.d. les plus sombres et badass)*, Gary Grillo signe ici son seul long-métrage et c'est fort dommage tant sa mise en scène et son sujet -pourtant complexe et délicat- sont maitrisés et inspirés jusqu'au dernier plan.
Dixit la photographie oscillant entre le nocturne brumeux et bleuté et l'aridité fétide des collines rocailleuses. Une merveille esthétique de noirceur glacée, partagée fin 80s avec Bigelow, Harmon, Lustig & Cameron notamment. Si le soleil de l'Arizona crame la lentille du joli scope Panaflex 35mm, l'atmosphère y restera glacial.
Dixit aussi le cadrage acéré des plans mortifères, jeux de regards troubles, suppliques des opprimés et nerveuses scènes d'action. Même résultat positif sur la caractérisation évolutive des personnages principaux -souvent habités voire abimés par le remord et la frustration - où le consensuel ne fait pas loi. Sans oublier le parfait casting d'ordures patibulaires, de drogués (ultra) déviants et la partition tendue du solide Paul Chihara.
Le dernier tiers dont le mémorable et redoutablement efficace nettoyage du squat avec un climax d'anthologie ( découpage chirurgical de Steve Mirkovich (Big trouble in little China,Prince of darkness, Broken arrow, The passion...) rappelle l'ambiance miteuse/western urbain de They live et Assaut. Comme chez Carpenter ou Eastwood, ça tergiverse peu mais l'éloquence des enjeux de l'action est suffisamment explicite et les réactions, dévastatrices. Nihilisme, apprêté tenace de l'âme sudiste post-conquête de l'ouest, air crépusculaire, héros maudits refusant leur talent de tueur (ici Jack Lucarelli dirigé ultérieurement par Robert Hitcher Harmon dans Cavale sans issue, tiens, tiens)... si on recoupe les différents talents du métrage, tout fait sens dans la filiation avec les maîtres, particulièrement Big John.
Sec et sans appel mais à découvrir d'urgence.
Prix spécial du jury au festival de Cognac en 1986 aux cotés de son grand frère Hitcher.