Je ne comptais pas vraiment voir ce film au départ, pour tout un tas de raison. Je ne suis probablement pas la cible du film, et puis je n'aime pas vraiment Bradley Cooper. Mais je dois avouer que toute la controverse autour du film et de Chris Kyle a attisé ma curiosité, d'où mon visionnage du film. Et je regrette un peu car j'ai plus perdu mon temps qu'autre chose.
Le problème avec American Sniper, ce n'est pas tant dans son patriotisme. Avec un tel nom et une telle affiche, il est évident que le film va se faire du point de vue des Etats-Unis et en particulier du fameux tireur d'élite. De ce fait, le film ne montre ce qu'il se passe que du côté des soldats, tout personne étrangère à ceux-ci est donc traitée telle quelle. Le problème est plus dans les conséquences du patriotisme de Clint Eastwood, qui peint dans son film un héros parfait. A en croire ce que l'on voit, Chris Kyle est un grand héros exempt de défauts dont le seul regret est de ne pas avoir sauvé plus de compatriotes américains. Il est beau et fort mais surtout il est modeste et ne se vante jamais de ses exploits, il est même gêné lorsqu'il rencontre un autre soldat lui rappelant à quel point c'est une grande légende qui l'a sauvé, rappelant à son fils que son père c'est le meilleur. Il est torturé évidemment, des petits bruits et des petites choses lui rappellent la guerre, il n'est jamais vraiment revenu et évidemment ça cause des problèmes dans sa famille. C'est un parti pris pour rappeler que le réalisateur est américain lui aussi et qu'il en est fier et montrer au monde à quel point les Américains sont beaux et forts. D'un point de vue étranger aux Etats-Unis, c'est relativement casse-couille mais ça ne poserait pas particulièrement de problèmes si ce grand héros était un être de fiction. Le problème, c'est que c'est peu cohérent avec ce qui est connu de Chris Kyle. Le bonhomme a quand même appelé son livre autobiographique "American Sniper: The Autobiography of the Most Lethal Sniper in U.S. Military History", dans lequel il revendique plus de cent victimes de plus que les sources officielles, ça ne me paraît pas très modeste de sa part.
Mais certes, c'est un parti pris. Le message et l'idée principale ont beau être douteux, ça n'en fait pas forcément un mauvais film. Clint Eastwood, en bon patriote américain, a certainement voulu mettre en valeur les bons points de ce héros national et ne pas s'attarder sur la controverse autour. Le problème, c'est qu'American Sniper n'apporte rien de nouveau. Si ce n'était pas une "histoire vraie" mais qu'on remplaçait Chris Kyle par un quelconque personnage fictif aux mêmes caractéristiques, on retrouverait un film qu'on a déjà vu des centaines de fois ces dernières années. American Sniper est très classique, trop classique même. On n'est à aucun moment surpris par le film, tout se déroule comme on l'attend dans cet énième film à propos d'un héros américain torturé par la guerre mais qui fait ce qu'il faut pour le bien de son pays et blablabla. Le traitement n'est pas particulièrement novateur non plus, ça marche plus ou moins bien mais rien d'extraordinaire dans la réalisation du film, c'est même plutôt brouillon à certains moments. A part Bradley Cooper, le reste du cast est totalement invisible et on oublie les autres acteurs dès qu'ils ne sont plus à l'écran. Le personnage principal est lui-même plutôt fade, pas particulièrement attachant, rendant difficile de suivre ses aventures avec un quelconque intérêt.
En fin de compte, on s'ennuie quand même beaucoup devant ce film qui est en plus plutôt long. Si le message douteux du film est plus ou moins apparent selon les scènes, allant jusqu'à provoquer le malaise comme dans les dernières minutes où sont balancées des images au ton larmoyant des funérailles du bonhomme avec des drapeaux des Etats-Unis un peu partout, l'ennui est en revanche constant. Il ne se passe pas grand chose digne d'intérêt, et ce n'est clairement pas le jeu de Cooper ni le portrait qui est fait du tireur d'élite qui va donner envie de s'intéresser un seul instant à la vie de ce supposé héros.