On avait découvert Marçal Forés avec Animals, un premier long métrage troublant capable de marier les genres avec une impressionnante maîtrise. Le jeune cinéaste catalan nous revient avec un second film aussi réussi, mais malheureusement inédit en salle (lui aussi).
Au cœur du récit, le lien qui se tisse entre un professeur de Chinois et l'un de ses élèves nous conduit dans de troubles contrées. De Barcelone, on voit peu : un bois de Montjuic servant de lieu de drague, une salle de cours, l'appartement de Carlos, quadra viril assumant ses goûts pour le sexe sans lendemain. La rencontre avec Toni est fortuite. L'élève semble fragile, timide, incertain.
On imagine le film tourné avec peu de moyens. C'est aussi sa richesse. Après un prologue presque documentaire, Marçal Forés installe et distille un climat déroutant. On se laisse porter sans savoir où l'on va. C'est érotique et inquiétant, excitant dans tous les sens du terme. Mêlant là aussi les genres, sûr de son fait, maîtrisant la forme comme le fond (images sombres, travail sonore subtil), le cinéaste nous conduit à la lisière du fantastique, exacerbant nos fantasmes en dévoilant les siens, construisant une singulière histoire d'Amor eterno (amour éternel) dont les dernières scènes fournissent la clé.
Cousin catalan de João Pedro Rodrigues ou d'Alain Guiraudie, cinéaste à la modernité affirmée, Marçal Forés enthousiasme par une approche aussi sensitive que cérébrale. Si l'on regrette le caractère encore confidentiel de son talent, on ne peut que se réjouir qu'il existe encore des réalisateurs qui aiment le cinéma.