Le film est sorti dans un cadre de froid polaire
Haneke a décidé de repousser les limites émotionnelles du spectateur encore plus loin que précédemment, déjà qualifié de « pervers » usant de tous les recours pour bouleverser son auditoire. Le teint blafard et des larmes dans les coins de ses yeux cernés. Le réalisateur les filme tous au plus près de leur intimité. Sans jamais durcir les traits. De la première absence d’Anne, aux fleurs déposées autour de son visage. Du pli rieur au coin de l’œil à l’amertume d’une commissure de lèvre ne pouvant plus sourire face à la maladie. Le réalisateur délivre l’amour tel qu’il est. Un sentiment brut, malmenant et surtout passionnel. Une hérésie du film d’amour classique.
Trintignant ne voulait plus jouer la comédie, ça lui allait bien de lire de poèmes au théâtre, là il pouvait être le libertaire et non plus la personne attristée par le décès de Marie. Mais Haneke avait écrit ce rôle pour lui. Suicide-toi si tu veux, mais joue Amour d'abord. Nous avions failli perdre Trintignant et Haneke l'a ressuscité. A côté de cela, nous avons une Emmanuelle Riva émouvante, une Huppert glaciale et toujours ces ritournelles de Schubert, Bach ou encore Beethoven. Qu'on soit amateur de musique classique ou non, la magie est là. Ce film est sublime. Et il l'est car la catharsis a lieu. On ne sort pas d'Amour indemne.
Le spectateur quitte la salle empreint d’une tristesse que je voudrais décrire comme arctique