Anastasia
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Anastasia

Long-métrage d'animation de Don Bluth et Gary Goldman (1997)

Grand succès en salle lors de sa sortie, le film Anastasia semble désormais tombé dans un oubli qu’il ne méritait pas. S’il ne possède pas que des supporteurs, il dispose pourtant de qualités qui devraient lui valoir, encore aujourd’hui, une place dans le cœur des amateurs de cinéma d’animation.


Le destin de la grande-duchesse Anastasia, 4ème fille du Tsar Nicolas II de Russie, aura fait partie des grands mystères du XXème Siècle, même si aujourd’hui le voile a été grandement levé sur ses tenants et aboutissants.
Un peu d’Histoire ne fait jamais de mal. En 1917, n’arrivant plus à supporter le poids de la Première Guerre Mondiale et les nouvelles réalités économiques, la Russie se retrouve exsangue. Une série d’événements mène à la Révolution de Février 1917, et à l’abdication du Tsar, remplacé par un gouvernement provisoire. En Octobre de la même année, Lénine et ses Bolchéviques prennent le pouvoir et tentent d’imposer leurs idées. Détenue, la famille impériale se fait finalement exécuter dans la nuit du 16 au 17 Juillet 1918, dans le plus grand secret. Leurs corps sont ensuite débarrassés de leurs vêtements, brûlés – leurs visages détruits à l’acide afin de rendre impossible toute identification – puis jetés dans un puits de mine. Ce mystère excessif, apparemment souhaité par Lénine, a donné naissance à de nombreuses rumeurs, notamment sur la jeune Anastasia, qui aurait survécu au massacre. Par la suite, au cours du XXème Siècle, plusieurs femmes ont prétendu être la grande-duchesse, ce qui a contribué à créer une légende autour du personnage.
Depuis, les corps des membres de la famille impériale ont été retrouvés, et les analyses ADN ont prouvé que Anastasia faisait bel et bien partie des victimes.


Mais rien n’interdit de rêver, et de nombreux artistes nous ont démontré qu’ils n’hésitaient pas réécrire l’Histoire à leur convenance. Enfin, cela dépend de quelle histoire il s’agit…
Rien n’empêche donc Don Bluth et Gary Goldman de s’en donner à cœur joie avec Anastasia. Leurs noms ne vous disent peut-être rien, mais leur parcours parle pour eux. Anciens des studios Disney – Don Bluth a notamment été directeur de l’animation sur Peter et Elliott le Dragon et sur Les Aventures de Bernard et Bianca – ils forment à la fin des années 70 la société Don Bluth Productions aux côtés de John Pomeroy, lui-aussi animateur chez Disney. Leur but : créer des films d’animation possédant l’esprit originel des Grands Classiques Disney, qu’ils considèrent comme absent des plus récentes productions du studio. Ensemble, ils produisent et réalisent plusieurs long-métrages à succès aux cours des années 80/90 : Brisby et le Secret de NIMH, Fievel et le Nouveau Monde, Charlie, Poucelina, ou encore Le Petit Dinosaure et la Vallée des Merveilles.


Si Anastasia possède un style plus adulte que leurs précédentes productions – en apparence, tout du moins – impossible de ne pas y retrouver l’empreinte de Walt Disney. Celle-ci se ressent particulièrement à travers les très nombreuses chansons qui parsèment le film. Lesquelles font indubitablement partie des points forts de Anastasia, comme en témoignent ses nominations aux Academy Awards dans les catégories de la meilleure bande-son, et de la meilleur chanson pour « Journey to the Past » (« Voyage dans le Temps » en VF). Ses chansons « In The Dark Of The Night » (« Au plus Noir de la Nuit » en VF) et « Once Upon a December » (« Loin du Froid de Décembre » en VF) méritent tout autant d’éloges. Cette dernière, tout particulièrement, est associée à une des scènes les plus visuellement abouties et émouvantes du film.


Parallèlement à cette musique de grande qualité, le scénario ne constitue pas un point fort. Aucun reproche à lui faire en soi, mais pour autant, il n’a rien d’exceptionnel et se montre même fort prévisible. A la rigueur, parler d’une princesse moderne – par opposition à celles issues des contes de fée – peut être considéré comme une véritable touche d’originalité. Pour le reste : une orpheline qui se découvre des origines princières, un voyage semé d’embuches, un grand méchant pas beau,… Du grand classique que tout ça.
Les atouts de ce long-métrage se trouvent ailleurs. Prenons par exemple les personnages : tous ne valent pas nécessairement que nous nous arrêtions dessus, mais quelques-uns sortent vraiment leur épingle du jeu. A commencer par Anya, notre orpheline volontaire qui ne se laisse pas marcher sur les pieds, ce qui fait forcément du bien dans la mesure où elle assume le rôle principal. Mais la palme revient indubitablement aux deux malfaisants compères : Bartok et Raspoutine. Même si « malfaisant » n’est pas un terme qui conviendrait à la chauve-souris parlante du sinistre moine ; en effet, son apparence et son attitude désinvolte en font une personnalité sympathique et attachante, ce qui explique d’ailleurs qu’elle aura droit à son propre film d’animation, sobrement intitulé Bartok le Magnifique. Raspoutine, par opposition, compte parmi les méchants les plus effrayants du cinéma d’animation. Un des plus bouffons, aussi. Cette dualité s’explique facilement par sa folie, sa soif de vengeance, sa manie de vendre son âme au premier venu en échange d’une malédiction, son physique ingrat, et son statut de cadavre ; ce dernier point faisant que son corps tombe littéralement en morceaux, morceaux qu’il a parfois bien du mal à recoller. En VO, c’est Christopher Lloyd qui prête sa voix au fanatique Raspoutine, ce qui lui va comme un gant. A ce propos, il est dommage que dans pour la VF, son rôle n’échoit pas à Pierre Hatet – son comédien de doublage attitré – mais à Richard Darbois, probablement car plus habitué aux phases de chant (puisqu’il incarne notamment le génie dans le Aladdin de Disney).


Là où Anastasia se démarque de la concurrence, c’est au niveau de sa réalisation et de sa direction artistique, puisque ces deux aspects purement techniques permettent d’élaborer des scènes particulièrement réussies. Certaines en deviennent même de véritables bijoux, bien souvent celles associées aux chants, avec par exemple des chorégraphies fouillées, ou des décors d’une grande finesse. Reconstitution du palais des Tsars, Paris représentée comme si la ville était devenue le jouet de peintres impressionnistes, enfers peuplés d’insectes, fantômes sortant des tableaux dans une valse magnifique : ce long-métrage regorge d’idées visuellement intéressantes, qui apportent une profondeur étonnante à l’ensemble. Dommage que, parfois, les images générées par ordinateur se mêlent à l’animation traditionnelle, avec un rendu d’une qualité discutable ; un comble pour des réalisateurs qui ont quitté les studios Disney notamment car ils n’approuvaient pas l’utilisation des techniques modernes.
Au-delà des considérations purement techniques, ce film se montre capable de distiller une émotion rare, de faire monter les larmes des spectateurs en touchant une corde sensible, et de provoquer des explosions de sentiments.


Mélangeant à la perfection une esthétique rare et une bande-son magnifique, Anastasia propose aux spectateurs une expérience belle, émouvante, et envoutante. Aujourd’hui un peu vieilli, il n’en demeure pas moins un film d’animation d’une qualité exceptionnelle, signé par deux des plus grands noms du genre.
Évidemment, niveau historique, cela revient souvent au grand n’importe quoi. Mais pas plus que Inglourious Basterds.

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le 4 mars 2012

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Ninesisters

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