Perdre au jeu
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le 31 août 2023
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J'ai enfin pu voir la Palme d'Or 2023 et j'avais hâte car j'aime bien les trois premiers films de Justine Triet. J'avoue que j'ai surtout un coup de cœur pour ses deux films avec Virginie Efira parce que j'adore cette actrice et que Triet a su lui donner des rôles très différents de ceux qu'elle avait l'habitude de jouer jusque là.
Justine Triet tient à nous montrer ce que la plupart des films de procès ne montrent pas comme la reconstitution du crime par exemple, tout en travaillant sur une période de temps assez étendue. Les ellipses servent le film et permettent à la cinéaste de se focaliser uniquement sur ce qui l'intéresse : Sandra, son fils, et évidemment les arguments des avocats campés par Swann Arlaud et Antoine Reinartz dont le personnage est très incisif. Ainsi, au fil du procès, on apprend des choses en même temps que les jurés qui vont faire pencher la balance en la faveur d'une thèse ou d'une autre. D'ailleurs, c'est assez rare, mais les flashbacks ne sont pas là pour nous "donner" des informations, mais pour illustrer les faits que le procès évoque, pour que ce soit plus réel pour nous mais tout aussi ambigu et flou que pour la juge.
Les personnages sont passionnants, surtout le fils malvoyant qui se retrouve balancé d'un côté à l'autre comme les mouvements de caméra le suggèrent au tribunal par exemple. Il est hanté par les doutes, son handicap ne l'aide pas, et il est un témoin très important dans l'affaire. Jehnny Beth va l'accompagner pendant une partie du film et son personnage est aussi touchant. Elle est autant droite dans ses bottes que compatissante et c'est beau à voir, alors qu'elle apparait assez peu. Même le chien est un personnage soigné (la palme Dog est complètement méritée). C'est lui qui ouvre le film et il va avoir un rôle important dans le film, l'air de rien. Et en plus il est tout beau.
La langue a son importance également, puisque dans ce couple détruit par cette chute mortelle, on avait une allemande et un français qui communiquent en anglais. Le personnage de Sandra doit tout au long du film s'exprimer en français la plupart du temps, mais va finalement beaucoup communiquer en anglais et ce n'est jamais gratuit. Cela traduit aussi bien la confiance qu'elle a en la personne à qui elle s'adresse que son état de fatigue, et j'ai trouvé que c'était très bien mené.
L’ambiguïté est cultivée du début à la fin du film et ça le rend passionnant. La musique a son importance puisque c'est en musique que le pire se déroule et que la tension va monter avec le gamin qui apprend le piano et fait des fausses notes de temps en temps. Le choix des lieux est également capital puisque ce grand chalet où l'intrigue démarre ne nous est jamais montré dans un beau plan large. On filme l'intérieur quasiment comme une maison hantée, où l'on va explorer quelques pièces sans jamais avoir une vision globale de l'espace. Et puis il y a cette deuxième partie du film où on va suivre le procès et quasi-exclusivement le procès. On sort rarement du tribunal et si c'est le cas on retourne au chalet la plupart du temps.
La bonne idée du film, c'est de nous montrer froidement ce qui importe dans une affaire aussi louche : déterminer si quelqu'un est coupable ou non, tout en sachant qu'on aura peut-être jamais le fin mot de l'histoire. La réalité, on ne la connaitra jamais, et le résultat ne sera jamais un véritable soulagement, quel qu'il soit. C'est un excellent film, sans doute le meilleur de sa réalisatrice, et j'espère qu'elle continuera à me surprendre avec les films suivants.
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Créée
le 2 sept. 2023
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