Andreï Roublev est un film exigeant. Une œuvre spirituelle où se mêlent l’artiste, Dieu et les hommes. Une fresque grandiose annoncée par ce prologue en ballon, qui commence bassement, vilement, pour se terminer dans l’apothéose du carillon puissant d’une cloche et de cet épilogue somptueux d’une caméra enfin en couleur qui scrute les icônes atteignant la dimension mystique du final de 2001.
Je dois dire qu’il ne m’a pas été facile de rentrer dans ce film. Si le prologue est visuellement fantastique, les 2 premiers chapitres m’ont laissé plutôt de marbre. Mais dès qu’Andreï expose sa foi à Théophane avec sa vision de la Passion du Christ, le film prend une ampleur toute autre. Dès lors les chapitres s’enchainent. L’horreur et la bêtise humaine de ce moyen-âge russe ou règnent l’intolérance, la violence et l’avidité mettent à mal la foi d’Andreï et donc son art.
Si tout ne m’a pas séduit (l’épisode de la sourde-muette avec les Tatars que j’ai trouvé longuet et sans que ça apporte grand-chose), que quelques moments sont à la limite du ridicule (les yeux crevés, les faux coups de béliers), Tarkovski rattrape le tout par une maestria et une poésie impressionnante. Que ce soient les travellings pendant l’attaque des Tatars, les flocons de neige dans l’église, les feux pour la cloche et les multiples plans larges aériens, tout participe à un émerveillement quasi constant.
Andreï Roublev est une figure christique dans le bon sens du terme. Point de sauveur de l’humanité mais un humaniste. Un homme qui aime son prochain et souffre pour lui. Un homme qui se retirera du monde jusqu’à atteindre l’illumination devant ce que les hommes peuvent accomplir de beau et de bon.