Pas le meilleur de Lubitsch, loin s'en faut, mais pourvu de jolis pointes de beautés diverses, ce film produit un divertissement un peu inégal il est vrai.
Je dois concéder de prime abord que mon manque d'attirance pour la froide Marlène Dietrich y est sans doute pour beaucoup. Les gros plans sur la blême Marlène sont tellement trafiqués par le chef opérateur, aidé en cela par les nombreuses et inhumaines couches de peintures que l'équipe maquillage lui a collé sur le visage, que la star apparait immaculée. Désolé mais voilà une conception trop désincarnée pour lui trouver forme humaine et tendre ainsi vers une sorte d'empathie dans son trajet amoureux.
En revanche j'ai bien plus de compassion pour le trouble d'Herbert Marshall, excellentissime et classieux. Peut-être même est-il encore plus prodigieux que dans Trouble in paradise. Le film vaut largement le coup d'oeil pour cet immense artiste. Quand un grand homme politique, tenant les rênes de l'avenir européen se transforme en un petit garçon perdu dans ses tristes pensées, ahuri par la souffrance amoureuse, reprenant ensuite ses esprits et sa virilité... Oui, un très beau personnage pour un très grand acteur.
Alors que j'avais jusque là un regard un poil distant pour Melvyn Douglas, que je trouvais bien sans plus, qui ne dégageait rien d'extraordinaire, il m'a semblé que sa lippe quasi bovine prenait un certain tonus. Le froncement de sourcil et les dialogues saillants à la bouche ont fait le reste : il apparait avec un personnage fort et romantique à la fois.
Marlène Dietrich n'est pas mauvaise en soi, on ne peut pas dire cela, seulement que son personnage à la plastique rigide manque d'humanité. Wilder avait su lui donner cela dans La scandaleuse de Berlin, une gouaille et une puissance d'un charme fou. Ici, elle marche comme une statue, n'a pas une ride au front, un glaçon à pattes. Melvyn Douglas a bien du mérite à donner une belle impression sans avoir un retour flamboyant même s'il n'y a pas grande difficulté à paraitre vivant à côté de ce mur.
Cette histoire d'adultère, même si elle ne ménage pas de grande surprise du point de vue moral, a le mérite de faire du recel de belles pépites verbales. C'est là aussi un des points forts, de bons dialogues, de la percussion, du sous-entendu, du bien pensé.
Entre Herbert Marshall et les dialogues, il y a là un bon rapport qualité/prix.