Angélique et le Roy par pierrick_D_

Le sort s'acharne sur notre pauvre Angélique,qui continue vaillamment à enterrer ses mecs successifs.Le dernier en date,son cousin et mari Philippe de Plessis-Bellière,vient de mourir à la guerre et le roi Louis XIV,qui veut se faire la belle depuis longtemps,la fait revenir à la Cour afin de lui confier une mission de la plus haute importance,séduire l'ambassadeur de Perse en vue de lui faire signer un traité capital pour la France.La jeune veuve refuse la proposition malhonnête puis se ravise quand Loulou conditionne sa collaboration horizontale à la restitution de la propriété de son premier époux Jofrey de Peyrac,confisquée il y a belle lurette.Toute émue à l'idée de récupérer cette maison où elle a connu tant de bonheur,Angie va donc courageusement affronter le dénommé Batchiary Bey,un dignitaire oriental sadique qui ne s'embarrasse ni de scrupules ni de politesses.Troisième épisode de la saga tirée des romans d'Anne et Serge Golon,ce film est fabriqué par la bande habituelle menée par Bernard Borderie,réalisateur,producteur et scénariste de toute la série,comme toujours flanqué à la prod et à l'écriture de son camarade Francis Cosne qui produira entre 78 et 80 la trilogie des "Brigade Mondaine".Les deux compères se sont adjoint pour rédiger le script le concours d'un troisième larron de poids,l'historien très médiatique Alain Decaux,sans que ça n'aboutisse vraiment à une exactitude historique crédible.Le compositeur Michel Magne poursuit ses agréables variations sur son célèbre thème musical alors qu'une nouveauté apparait avec la nomination au poste de dialoguiste d'un grand spécialiste du genre,Pascal Jardin,qui succède à Daniel Boulanger.Comme le film précédent,"Merveilleuse Angélique",celui-ci est un fourre-tout assez confus marqué par l'inconstance d'une héroïne au comportement fluctuant et agaçant.Elle ne sait pas ce qu'elle veut,elle change sans arrêt d'avis,elle emmerde tout le monde avec ses exigences,bref c'est une sacrée connasse.On veut bien compatir à ses horribles malheurs mais elle cherche un peu les ennuis aussi,et elle en attire aux autres par la même occasion,du reste elle perdra encore un ami fidèle dans l'aventure.Ceci dit les gars veulent toujours l'aider ou la baiser,ou les deux à la fois,c'est pathologique cette histoire,alors qu'ils s'en prennent à eux-mêmes.Du reste la charmante marquise va moins passer à la casserole cette fois-ci,les tentatives de saillies étant adroitement et ridiculement évitées.Soit elle roule les types,le roi compris,dans la farine,soit elle est épargnée in extremis par un sauvetage providentiel aberrant.Si on compte bien,un seul homme aura droit à ses faveurs ici,et de manière tout-à-fait consentante,ce qui n'est guère d'usage dans la franchise.Ce qui rattrape cet épisode est son côté hardcore avec un invraisemblable cortège d'horreurs sadiques relativement surprenantes dans ce qui reste pourtant un film grand public.Le perse notamment est un sacré numéro qui se repait de voir un condamné roué en place publique,qui fait fouetter une de ses servantes qui n'a fait que lui obéir,et qui pour finir manque de peu d'égorger notre chère marquise.Dans le même style on a Angélique frappant une domestique avec un linge empoisonné,provoquant la mort de la fille assortie d'atroces lésions,ou un chien empoisonné pour avoir goûté un plat qui ne lui était pas destiné,et en point d'orgue des messes noires où on sacrifie des bébés,les mecs n'y sont pas allé avec le dos de la cuiller pour le coup,et ça rend le récit plus dense et captivant.Malgré la présence de Decaux,les faits réels sont très falsifiés et le film mélange allègrement personnages et évènements historiques et fictionnels dans un joyeux bazar.Les répliques de Jardin sont plutôt brillantes,principalement celles qu'il met dans la bouche de Desgrez,le chef de la police à l'ironie matoise,ou dans celle de l'obtus Bey,imperméable aux usages occidentaux.Ainsi cette scène où Angie lui explique qu'avant de culbuter une femme il faut lui faire la cour.Le perse ne sait même pas ce que ça signifie et lui rétorque qu'il préfère sa méthode."Et quelle est-elle?",lui demande-t-elle ingénument.Réponse lapidaire du furieux:"le viol!".Voilà qui met dans l'ambiance!Michèle Mercier ne s'améliore pas dans son jeu mais elle est toujours aussi sexy,et on retrouve autour d'elle des cadres de la saga tels que Jean Rochefort,extraordinaire de malice et de froideur en Desgrez,le distingué autant que libidineux Jacques Toja en Louis XIV,Philippe Lemaire qui joue le cynique aristocrate De Vardes et le nain Roberto échappé de la Cour des Miracles.Les deux maris d'Angélique,Claude Giraud et Robert Hossein,sont là également mais on les voit peu car le premier meurt au début du film et le second ressuscite à la fin.Parmi les nouveaux on remarque surtout Sami Frey qui campe totalement au premier degré un Bey parfaitement cruel et inadapté à nos moeurs.Estella Blain joue la Montespan,maîtresse bafouée du roi,et soutient largement la comparaison avec Michèle Mercier question plastique,alors que Jean Parédès exécute un numéro énorme en diplomate bavard et stupide.On voit fugitivement surgir les visages bien connus de Michel Galabru et Jean Lefebvre alors que certains comédiens sont grave à côté de la plaque,à l'exemple de l'allemand Fred Williams en noble hongrois flamboyant,de l'insupportable italien Pasquale Martino en vieil alchimiste ou du français René Lefèvre,inexistant dans le rôle de Colbert.