Angoisse
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Angoisse

Film de Bigas Luna (1987)

Voila, c'est parti pour ma première vraie critique. J'avais eu l'envie d'écrire d'abord sur un mauvais film, un peu gras, pour avoir la parole haineuse, simple et efficace, mais me voila sur un film d'horreur, "Angoisse" du GRAND Bigas Luna.
Alors oui, rooooh un film d'horreur, et sûrement certains penseront que c'est un sous-genre facile, avec des pirouettes scénaristiques, de sons et de montage sans intérêt réel, alors oui et non !
Oui il y a les films d'horreur que je regarde et que j'aime qui ne seront pas forcément de grands films qui marqueront le cinéma avec un grand C.
Et non, car le film d'horreur est un genre qui traverse l'homme qui le regarde, pas seulement par sa puissance visuelle et sonore... mais pour cette expérience vécue, ce grand frisson. Ce genre de film qui sait créer cet instinct de peur qui nous fait sursauter ou pleurer de frayeur dans notre lit, dans-un-coin-de-la-chambre-éloigné-de-la-porte. C'est un genre qui se vit. Ce qui importe avant tout c'est l'émotion qu'a suscité ce film "pendant"(même après hihi). Certes vous n'aimez pas ça mais reconnaissez-lui cet attrait indéniable ! Peut-être penserez-vous alors, être au-dessus de ce moyen d'expression, en fin de compte seulement émotionnel, et vous penserez que c'est une manière de faire monter l'adrénaline, comme les enfants, qui courent dans les parcs d'attractions "s'extravertir" dans les montagnes russes pleines de sensations, mais non vous avez tord. Pour moi ce serait plus comme laisser son âme aux mains d'un film qui a pour but de savoir vous brusquer dans vos petites vies confortables, en vous laissant assis douillettement sur un fauteuil avec ou sans vos amis, dans un cadre que vous aimez, qui vous est aisé.


    D'autres diront encore : "c'est pour les sociopathes ! Je ne veux corrompre mon imaginaire par des horreurs qui me marqueront, alors que je vis dans le plus beau des mondes" (euuuh vraiment ?). Donc oui certes, mais dans ce cas, coupez la télé arrêtez de sortir, commandez tout sur le web et n'oubliez pas d'installer un logiciel de contrôle parental sur internet.
Cependant j'ajouterais personnellement, que l'horreur est une forme d'évacuation des sentiments (frustration, tristesse...). Certains virulents rejetteront leurs remords sur un pauvre sac de sable, dans des crises d'hystérie ou même sur leurs proches qui les aiment, mais ce n'est pas mon cas. Plutôt que de m'en défausser, je préfère oublier, et remplacer par un film d'horreur fort en émotion qui me fera prendre conscience de la petite trace de cul que je suis sur la terre.

Trêve de bavardages où en est cette critique ?
Alors, "Angoisse" est un film qui se veut audacieux par la mise en scène et dans le scénario pour chercher à créer un malaise, une nouvelle porte vers le malsain et l’expérimental sans paraître prétentieux ou même grossier. Ici on a affaire à un réel film d'auteur qui me marquera pour tout le reste de ma vie, pas pour ces scènes glauques, son sang, ces titillements d'iris qui me sont insupportables ou ces scènes d'hypnose qui donnent la névrose (je le répète encore une fois mais j'adore et bon, c'est ma première critique rien n'est parfait), MAIS POUR CETTE PUTAIN D'EXPÉRIENCE SENSATIONNELLE." Angoisse" n'est pas un film d'horreur classique mais un pur chef d'oeuvre de sensation et je vais vous expliquer pourquoi !


D'abord il dispose d'un esthétisme particulièrement macabre, très sombre, assez verdâtre et jauni, ce qui lui va à merveille. J'ai même cru d'abord à un film récent au ton old school. S'y ajoute une ambiance façon cow boy pour les 25 dernières minutes avec des bruits de revolver qui excitent et renforcent ce film dans le film.


    De plus le choix des acteurs est parfait : Zelda Rubinstein excelle dans son rôle de mère au déplacement maladroit de femme-pigeon, qui instaure dès les premières minutes un malaise et justifie les fourvoiements de son fils; Michael Lerner dans son rôle d' "Infirurgien" , gaillard escargot pataud  qui se colle à ses proies pour 

les énucléer et y laisser sa trace (comme un escargot hihi). D'où l'utilisation à bon escient de la focale qui saura rendre aveugle le spectateur en adhésion avec le sens du film.


Qui plus est, les acteurs dans le cinéma ne sont pas foufou dans leurs jeux, mais là en est tout l’intérêt car ils créent une sensation de proximité avec le spectateur que nous sommes,( les protagonistes, eux, trop dérangeants ou détestables ne peuvent être des personnages auxquels s'identifier) et là est tout l’intérêt ! On assiste déjà à un film qui sait orienter l'émotion mécanique que crée chaque acteur, dans un pur but de mise en scène et d'immersion. A la première vision de ces seconds rôles je m'étais dit : -"boh, encore un film qui nous prend pour des cons et s'oblige à nous expliquer ce que le spectateur doit penser des personnages"
Mais pas du tout ! Luna utilise ce procédé pour impliquer lui-même le spectateur dans le film et va jusqu’à essayer de l'hypnotiser !! Un réel tour de force qui a su (certes sous dose de stupéfiant, ce que je vous recommande si vous êtes amateur de ce genre d'expérience) moi-même m'ensorceler, et m'intégrer en tant que troisième plan du film.


    Pour finir, de manière malheureusement brusque car je suis mauvais en syntaxe et je m'en excuse, j'ajouterais que les bruitages exagérés (bruit de vitre quand un homme se frotte les yeux) collent judicieusement au vice même du film. 

Enfin, La bo est splendide : Luna sait quand il doit inquiéter son spectateur, quand il doit le rassurer pour le replonger dans un coma visuel, et même quand la faire taire, ne serait-ce qu'une seconde pour entendre un bruit ou un échange verbal.


Un film expérimental comme il n'en existe plus ! Allez le voir, faites-vous peur et vivez heureux dans un monde triste.

Tracroute
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le 1 juin 2016

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Tracroute

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