Les hommes naissent et demeurent libres et égaux en droits, mais il vaut mieux être propriétaire. Depuis la loi Elan de 2018, il est possible de confier sa propriété vacante à un organisme, privé ou public, chargé d’y placer des résidents, en attendant de pouvoir réhabiliter ou vendre ce bien. Loin de toute ambition sociale, le dispositif permet avant tout aux propriétaires et à ces partenaires à but lucratif d’éviter les squatteurs et de s’engraisser sur le dos de personnes précaires, attirées par ces insidieuses offres de résidences temporaires pour ne pas vivre à la rue. Elle-même menacée d’expulsion avec son fils de 14 ans, Inès accepte de travailler pour une de ces agences et de surveiller ces locataires sans droits, astreints à un règlement draconien et une surveillance quasi-orwellienne. Prise dans les rouages de ce système cruel et confrontée directement à ces problématiques de précarité, la mère célibataire est rapidement mise face à un dilemme cornélien : lutter contre l’immoralité de son employeur au risque de perdre son emploi ou trahir les résidents pour garder son salaire. Sans prise de risques ni originalité, Nicolas Silhol déroule cependant un film social aussi efficace qu’actuel. Ralenti par son introduction quelque peu poussive et le jeu monolithique et glacial de Louise Bourgoin, le long-métrage peut s’appuyer sur l’impeccable ensemble des personnages secondaires, notamment l’étourdissant Samy Belkessa en adolescent fan de rap. S’il reste globalement trop manichéen, le film remplit sans équivoque sa mission de pédagogie et offre une importante piqûre de rappel sur l’ampleur des inégalités de logement en France. Au cas où l’on oublierait que traverser la rue ne suffit pas à trouver un toit.