Août (avant l’explosion), c’est découvrir l’état d’Israël sous un autre angle social. Ce documentaire est la représentation de « la face cachée » ou plutôt d’un quotidien, que nous sommes parfois loin d’imaginer. Cette découverte repose une nouvelle fois, sur Monsieur Avi Mograbi, que l’on pourrait qualifier d’investigateur, de journaliste, de réalisateur, d’inspecteur voire d’activiste ou encore tout simplement d’humaniste. En effet, toutes les positions citées évoquent une réelle polyvalence de ce réalisateur, pour le meilleur d’un point de vue de l’innovation des procédés, et pour le pire en termes d’engagement qui vont au-delà de son statut.
Dans cette œuvre, on s’attend à retrouver les codes traditionnels du cinéma Mograbi, une communication spécifique cherchant un dialogue directe avec le spectateur. Une manière de filmer qui donne l’impression constamment de vivre les échanges avec le réalisateur, ou encore un film engagé où des opinions définis sont clairement exposés. De plus, avec ce titre plus ou moins dynamique, on espère en découvrir plus sur cet état, souvent réputé pour être réactionnaire. L’explosion pourrait également se traduire par l’implosion d’un système, une forme d’autodestruction de la société qui a tendance à s’individualisée de manière excessive. Le mois d’août n’est pas choisi au hasard également, pour permettre d’attirer l’attention sur un mois qui est généralement symbolique pour plusieurs cultures. L’objectif au-delà de la découverte culturelle, et de dresser le portrait le plus juste de la société israélienne, notamment en termes de cohésion sociale.
En ouverture, s’impose Benyamin Netanyahou qui est un politicien assurément charismatique et certain de ses convictions, n’hésitant pas l’incitation à la haine « Ils ont peur ! Ils ont peur ». Une manière d’haranguer les foules, pour une entrée en matière que l’on pourrait qualifier de violente, et à la fois naturelle, lorsque l’on en apprend plus au cours de l’œuvre sur cet état indépendant. Dans, cette partie, on pourrait notamment relever le fait que la manière de filmer et d’orienter le spectateur vers certaines idées préconçues n’est pas très pertinente. En effet, la neutralité est indispensable la plupart du temps pour laisser le choix au spectateur de se forger son propre opinion. En revanche, dans ce documentaire, on a plus l’impression de suivre un courant de réflexion plutôt qu’une présentation sommaire laissant à l’audience le choix d’être son propre juge.
L’image de la femme aussi dans la société est plus ou moins évoquée, même si l’on comprend qu’actuellement les femmes se doivent encore de travailler sur leurs reconnaissances. De plus, on discerne au travers de ce documentaire un peuple animé par une passion, que l’on pourrait qualifier d’excessive et qui entraîne différents conflits sociaux. En effet, on discerne dans ce long métrage, une analyse plus détaillée des relations sociales au sein de la population. On s’aperçoit rapidement dans un premier temps que des tensions sont réellement présentes au sein de l’Etat. Mais, l’auteur ne retranscrit pas de la meilleure des manières cet aspect, car il ne laisse pas assez d’autonomie au spectateur qui peut difficilement forger son propre opinion.
Par la suite, dans ce troisième long métrage, Août (avant l’explosion) d’Avi Mograbi, l’auteur cherche à mieux nous expliquer la fracture sociale évoquée lors de ses précédents documentaires. On discerne ainsi une société atteinte d’un racisme primaire, où la méchanceté gratuite devient une forme de tradition. A l’image, du traitement des israéliens évoqué dans cet œuvre, notamment envers les « noirs » et les « chinois » qui impactent négativement selon les sondés, l’équilibre du pays. On s’aperçoit ainsi, que l’Etat d’Israël vit dans des conditions précaires, notamment d’un point de vue psychologique, où la violence verbale voire physique est omniprésente. L’éducation semble être aussi un paramètre majeur dans la situation actuelle de cette société, notamment lorsque l’on voit des enfants tenir des propos disproportionnés concernant les « arabes ». De plus, on constate que le niveau de confiance mutuel des israéliens et relativement bas, ce qui est notamment dû au fait du développement de cette mentalité individualiste.
Cependant, encore une fois on pourrait s’interroger sur le fait que le réalisateur filme ce qu’il souhaite, et perd ainsi une certaine objectivité. En effet, en se mettant à la place des israéliens, nous serions en mesure de se demander pourquoi filme-il ses images, ou sont passés nos aspects positifs ? Pourquoi se met-il à filmer les marginaux de notre société pour nous représenter ? Toutes ces questions, peuvent laisser penser que contrairement à ce que le réalisateur affirme, les moments ne sont pas sélectionnés par hasard, les places sont minutieusement choisies. A l’image du match de football, où le réalisateur tente de prendre comme exemple des supporters virulents comme si ils étaient des cas appart dans le football hexagonale. On pourrait même dire, que son cinéma tend à être un peu trop « populiste », de ce fait le juste milieu pour dresser un portrait efficace de la société israélienne est quelque peu biaisé.
Par ailleurs, après avoir visionné plusieurs de ses œuvres, on constate que son style cinématographique finit par s’user, le spectateur peut vite se lasser de ce style, prorévolutionnaire et philanthropique. En effet, on a parfois l’impression de suivre les aventures d’un justicier plutôt que d’un réalisateur, à l’image des échanges avec les militaires. Le problème majeur est que son engagement est trop important, et le réalisateur dépasse un peu trop son statut en s’engageant dans un cinéma de la violence. Il provoque même parfois ses « acteurs aléatoires » pour obtenir une certaine réaction ce qui est au contraire au point de vue omniscient qu’il souhaitait véhiculer. Par exemple, on pourrait citer son interpellation avec les agents de police, où le réalisateur agit de manière assez primaire, d’une certaine façon comme les personnes qu’ils essaient de filmer.
Autrement, on peut dire que son implication totale nous permet de découvrir la vie que peut avoir actuellement un israélien. Un moment qui retient particulièrement l’attention des spectateurs, c’est aussi le dédoublement des personnalités du réalisateur. Dans le fonds, on pourrait juger que les échanges laissent à désirer, mais d’un point de vue stylistique c’est réellement osé de la part d’Avi Mograbi. On retrouve, ainsi le réalisateur que l’on apprécie tant, celui qui innove, le très surprenant acteur/réalisateur qui prend des risques et redessine les codes du documentaire. Bien que parfois certains procédés utilisés par rapport à notre cinéma d’aujourd’hui paraissent un peu trop amateurs. En effet, on a l’impression que le réalisateur ne contrôle pas toujours l’exploitation de son potentiel, et tente des choses qui ont tendance à diminuer la qualité de l’œuvre.
Pour conclure, on pourrait qualifier de très innovatrice et dynamique, avec une seconde lecture toujours très intéressante. Notamment avec cette conclusion ouverte, où l’on voit le réalisateur reprendre conscience des faits actuels et ne forme plus qu’un avec toutes ses personnalités. Mais l'on distingue malheureusement, de nombreux points négatifs dans cette œuvre très sombre, qui parfois extrapole certaines thématiques.
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